vendredi 19 septembre 2008

La J.U.D.A dénonce le régime criminel de Lansana Conté et appelle à la solidarité de la jeunesse africaine.

19 septembre 2008

DECLARATION DE LA J.U.D.A

La situation socioéconomique se détériore gravement en Guinée[1]. Pendant que notre peuple de Guinée crie ses douleurs et manifeste contre toutes les carences et surtout contre le manque d’électricité, Lansana Conté - au pouvoir depuis 1984 - et ses alliés, déploient l’armée et la police pour tabasser les manifestants et leur tirer dessus. C’est un truisme que de dire que ces répressions font des morts et des blessés.

Ces derniers mois, en effet, il n’y a pas de jours où le peuple a manqué de signifier son ras-le-bol au clan Conté et ses alliés. Femmes, hommes, vieux, jeunes et enfants, tous s’insurgent contre les brimades et les privations de la mafia « Contée » qui plus est, rackette la population tant au marché que dans la rue. Malheureusement, la situation en Guinée n’est que le reflet de ce qui se passe dans tous les pays africains, à quelques degrés près.

La Jeunesse Unie pour la Démocratie en Afrique (J.U.D.A), dans son élan panafricaniste, s’insurge contre cette méthode sauvage de répondre aux requêtes de notre peuple et rappelle au clan Conté et à ses alliés qu’en tuant notre peuple, ils se rendent responsables de crimes qui ne resteront pas éternellement impunis.

La J.U.D.A apporte son total soutien à notre peuple guinéen contre le régime clanique, tyrannique, corrompu, kleptocrate et criminel de Conté soutenu mordicus par des alliés africains, occidentaux et asiatiques.

Pour mémoire, lors de la grève générale en 2007 qui, visiblement, conduisait le régime à sa dernière demeure, la France a simultanément permis à Conté de réprimer les manifestations en lui fournissant des armes et a piloté une médiation par le biais de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Pour paralyser le mouvement, elle a réuni les syndicats et les représentants de Conté afin de leur faire accepter un de ses serviles laquais en la personne de Lansana Kouyaté[2], en tant que premier ministre et chef de gouvernement, personnage ayant tant traîné dans toutes ces « institutions africaines » que la France tient sous sa botte. Comme si la crise se résumait à l’érection d’un poste d’un chef de gouvernement qui jusque là était du ressort du général Conté.

De toute évidence, notre peuple en Guinée, à l’image de l’ensemble du peuple africain, est dans la fosse aux lions. Il ne doit compter que sur lui-même. Toutes les expériences montrent que le peuple Africain est victime des richesses de son sous-sol et de son sol. Il existe une forte complicité entre les Etats néo-impérialistes (Occidentaux et asiatiques), leurs multinationales et les pions africains contre notre peuple.

Tenant compte de ces données, la J.U.D.A appelle les mouvements alternatifs guinéens à la vigilance. Elle les encourage vivement à plus d’organisation et de détermination pour faire triompher les intérêts du peuple et éviter que la momie Conté au pouvoir, dans sa décomposition, entame définitivement l’âme déjà éreintée de notre peuple en Guinée.

Le long règne de Conté n’ayant ni permis à la Guinée de poser les premières pierres d’une démocratie, ni d’inscrire les droits humains au centre des préoccupations étatiques, encore moins d’esquisser un début de développement, au nom de la jeunesse africaine, la J.U.D.A estime qu’il est donc temps que Lansana Conté et son équipe de carriéristes tirent les enseignements de la situation de détresse dans laquelle leur rapacité a plongé la Guinée.

Par ailleurs, la J.U.D.A rappelle à l’armée et à la police leur devoir qui consiste à la protection du peuple et non à l’envoi de milices qui suivent Conté et ses alliés dans leur entêtement criminel, dans le pillage systématique et dans leur volonté de tirer sur tout ce qui bouge contre eux. Car une Guinée libérée, libre, démocratique et engagée enfin pour la satisfaction des besoins de ses enfants, ne se fera pas contre elle. Mais bel et bien avec elle.

La J.U.D.A, enfin, exhorte vivement toute la jeunesse africaine à la mobilisation, à l’organisation et à un sursaut panafricaniste pour soutenir notre peuple en Guinée. Partant de là et dans cette même perspective panafricaniste, elle l’encourage à faire face à tous ces pantins de dirigeants qui opèrent contre le peuple africain au profit d’eux-mêmes et de leurs alliés. Sans cela, les souffrances s’aggraveront, nos richesses nous échapperont toujours, une bonne partie de notre peuple continuera à engraisser les requins de la Méditerranée, et les Africains seront toujours humiliés à travers le monde. Notre peuple paiera éternellement la dette odieuse, les infrastructures balbutiantes resteront en l’état ou s’effondreront, la santé de notre peuple restera toujours un détail, et l’éducation toujours extravertie et privée de moyens. Notre école véhiculera toujours des inepties telles que la coresponsabilité dans l’esclavage et nos valeurs africaines resteront toujours ridiculisées et méprisées. Notre agriculture produira toujours du café, du cacao, de l’arachide, du thé… pour nourrir les autres pendant que nous-mêmes avons faim. Des guerres néocoloniales iront en croissant sous une couverture ethnique mensongère, et les injonctions néolibérales du FMI, de la Banque mondiale, de l’OMC et de toute leur bande passeront toujours…

Bref, sans une action globale, concertée et vigoureuse menée par la jeunesse, il n’y aura point de salut pour notre Afrique.

Pour la J.U.D.A

Le Secrétaire Général

Rodrigue KPOGLI

http://lajuda.blogspot.com/

PS : Sur la Guinée, voir :

1-http://lajuda.blogspot.com/2005/08/guinee-la-juda-appelle-le-gnral-cont.html

2-http://lajuda.blogspot.com/2005/11/la-juda-condamne-la-tuerie-de-jeunes.html



[1] Premier producteur mondial de bauxite, la Guinée a des réserves de minerais et de métaux précieux divers à savoir d’importants gisements de bauxite, d’or, de fer, d’uranium, de cuivre. La Guinée est aussi bourrée d’eau.

[2] ancien secrétaire exécutif de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) - de 1997 à 2001. Depuis 2003, il occupait le poste de le représentant de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en de la République de Côte d’Ivoire.


vendredi 12 septembre 2008

L’Afrique est-t-elle condamnée à être perpétuellement violée par l’Occident ?


Togo : un pion de plus pour le FMI et la BM.

Comme sorti de la naphtaline, Fossoun HONGBO est nommé premier ministre au Togo, succédant ainsi à Komlan MALLY. Cette nomination n'est que l'aboutissement des rondes incessantes à Lomé des responsables du FMI et de la Banque Mondiale. En effet, ces deux institutions ont visité le Togo à plusieurs reprises depuis la signature de l'accord politique dit global.

Sous prétexte d'aider le Togo à se développer, ces deux vampires, accompagnés de leur aile marchante de la Banque Africaine de Développement (BAD), agités par les marionnettistes de l’UE et de Washington, s'activent plutôt à faire payer la dette, à demander une plus grande ouverture du marché togolais aux capitaux étrangers ainsi que l'accélération des privatisations, si tant est qu'il reste encore quelque chose à privatiser sous le ciel togolais. De toute évidence, Komlan Mally, premier ministre depuis le 3 décembre 2007, et démis de ses fonctions le 5 septembre dernier, a été incapable de mobiliser les ressources pour satisfaire les besoins des "bailleurs de fonds".

Chose curieuse, à chaque visite des missions du FMI et de la Banque Mondiale au Togo, la presse locale s'enthousiasme et présente la chose comme une tournée d'inspection à l'issue de laquelle, les dirigeants togolais sont sanctionnés et humiliés, ou comme une opération purement humanitaire au chevet d’un peuple togolais miséreux. Grossière erreur! C'est mal comprendre le rôle et le pouvoir de nuisance desdites institutions, qui en réalité, sont à la solde des puissances occidentales et principalement des firmes transnationales. Contre les prêts et autres (négligeables) dons, le FMI et la BM ainsi que les "donateurs" exigent, sans possibilité de recours, le démantèlement de l’Etat.

Pour atteindre ces objectifs, tant au Togo qu’ailleurs en Afrique, il faut avoir aux postes clés des hommes ou des femmes moulés et dressés dans des écoles occidentales néolibérales, experts dans des institutions internationales, ne connaissant aucune réalité du terrain sur lequel ils sont lâchés, suffisamment armés pour défendre les intérêts de leurs mentors, et n'ayant qu'une approche financièrement rentable des problèmes du pays. Capables de réciter à la minute toutes les théories d'ailleurs, ces marionnettes n'ont d’autres connaissances de l'histoire de leur pays que celles apprises de leurs maîtres. Les droits des citoyens n'existent pas à leurs yeux. Ils doivent réprimer ou étouffer les forces alternatives, à savoir l’opposition et les syndicats et faire adopter des lois toujours plus favorables aux étrangers. Ainsi, leur présence au pouvoir rassure les investisseurs étrangers. D'ailleurs le site de propagande du pouvoir RPT ne s'en cache pas. Dans un article titré La surprise du chef, on lit « Le nouveau locataire de la Primature aura à poursuivre le travail entamé par son prédécesseur, Komlan Mally, et à mettre en œuvre les grands chantiers de modernisation au Togo ; des chantiers qui vont bénéficier du soutien financier des institutions internationales comme le FMI, la Banque mondiale, l’Union européenne ou la BAD ».

La preuve en est que HOUNGBO se définit comme un keynésien. L'additif d'afro-optimiste dont il s'affuble est plus propagandiste et démagogique qu'autre chose. Il aurait dû ne pas l'évoquer car si notre bonhomme connaissait l'Afrique, il aurait compris que justement, c’est l’adhésion systématique des dirigeants africains aux théories importées qui, paralyse l’Afrique. L'Afrique a un modèle de société propre, fondé sur la liberté individuelle et la solidarité, hier représenté par l'existence d'un champ privé aux côtés d'un champ communautaire. Toute politique économique qui ne tient pas compte de cette réalité est vouée à l’échec et ne peut qu’encore massifier la pauvreté en concentrant les richesses du pays entre les mains d’une poignée d’individus disposant du capital. Le modèle économique africain est tout tracé. C’est l’économie populaire consistant à ouvrir l’actionnariat au peuple en transformant le champ collectif en entreprises publiques où chacun des citoyens doit investir, et le champ personnel en entreprises privées.

Houngbo a pour mission d’accélérer la casse sociale en continuant l’assainissement des finances publiques et la modernisation du Togo. Deux pratiques consistant en réalité à procéder à la suppression des barrières douanières, la libéralisation du mouvement des capitaux, la construction des infrastructures moins rentables pour le pays mais bénéfiques aux entreprises transnationales, l'augmentation des taxes et impôts, la privatisation des secteurs publics de l'eau, de l'électricité, la réduction des dépenses de santé, de l'éducation, la réduction des salaires, au blocage des avancements voire au dégraissage dans la fonction publique, la suppression de tout soutien public aux agriculteurs et de tous les frais affectés au bien-être de notre peuple. Bref, transposer mécaniquement le modèle libéral au Togo (et en Afrique) et détruire la vision africaine de la vie en communauté… Toutes ces mesures visent à faire des économies pour payer la « dette » et attirer les « bailleurs » et les « opérateurs économiques étrangers ». Un libéralisme pourtant de plus en plus violemment contesté dans son berceau occidental.

Au lieu de laisser ces guignols de dirigeants vendre les pans entiers de nos pays à des investisseurs étrangers, nous devons nous organiser et réaliser avant tout l’unité de l’Afrique. Ceci passe impérativement par le balayage systématique des marionnettes kleptomanes qui osent actuellement parler au nom du peuple africain. Manifestement, ces hommes et ces femmes, par leurs méthodes et leur indifférence face aux problèmes de notre peuple, prouvent qu’ils ne sont pas des nôtres, malgré leur peau noire. Ces criminels endurcis se moquent royalement de tout ce qui se passe autour d’eux. Voici deux exemples. Face au problème de l’immigration des jeunes africains accompagnés de femmes et d’enfants, dont les embarcations de fortune coulent, et qui se font dévorer par des requins de la Méditerranée, ils n’ont de réponses que le silence. Pire, ils demandent aux Européens de leur fournir des outils pour contrôler leurs frontières. Face au peuple qui crie sa faim et sa soif, dans les rues, ils n’hésitent pas à lui tirer dessus. Jamais dans l’histoire de l’Afrique, on a vu d’Hommes si prompts à travailler contre leur propre peuple. Non, jamais ! Tant que ces « dirigeants » seront au pouvoir, point de salut pour l’Afrique. Mais, il ne suffit pas de les renvoyer. Ceux qui les remplaceront doivent connaître notre peuple, son histoire, ses forces et ses faiblesses ; ceci pour formuler des solutions adaptées à ses besoins. Ces nouveaux dirigeants doivent être responsables, intègres, animés d’un esprit farouchement patriotique et comprenant l’acquisition du pouvoir comme une mission sacerdotale et non, comme un outil d’enrichissement personnel.

Il faut ensuite définir notre propre stratégie de développement à partir de notre culture, et affronter le marché en réglementant les investissements étrangers pour éviter que les secteurs essentiels de l’économie échappent aux populations locales. Nous devons jouer nos intérêts en établissant des partenariats avec les entreprises étrangères qui favorisent la formation et les transferts de technologies afin d’ajouter de la valeur à la production locale, et innover ainsi pour les producteurs locaux.

Au lieu de nous astreindre à des obligations néolibérales que les Etats occidentaux violent allègrement, nous devons procéder à une allocation massive de crédits à bon marché aux opérateurs du secteur informel pour les faire passer de l’informel au formel et accorder des subventions à l’éducation, à la santé, à la production vivrière, à l’industrie, à l’habitat, à la recherche scientifique et à la technologie. Les pays africains ne relèveront la tête que s’il émerge une classe moyenne locale - véritable moteur du développement - avec un soutien au commerce régional, à l’exportation et aux petites et moyennes entreprises. Aussi, dans un cadre démocratique, il nous faut élaborer des lois pour contrecarrer la fuite massive des capitaux et renationaliser les sociétés publiques privatisées, mieux, bradées.

Aucun Etat n’a pu se développer en démantelant ses propres bases. Or c’est ce que les « bailleurs de fonds » imposent à l’Afrique. Notre réponse doit être un refus clair et net. Les USA, les Etats européens et les dragons asiatiques ont tous réglementé, contrôlé, protégé durant toute la phase préliminaire de leur développement, et continuent de recourir aux mêmes pratiques autant que nécessaire. En forçant l’Afrique à agir à contre-courant, le FMI et la Banque Mondiale ainsi que leurs marionnettistes, l’inscrivent dans une logique de tutelle permanente.

Mais l’un des problèmes fondamentaux que nous devons affronter, c’est la dette. Nous devons refuser de la payer car « l’argent emprunté » n’est qu’un instrument d’asservissement du peuple et qui finance une répression systématique : nous ne pouvons accepter de payer les fusils et les balles qui nous massacrent.

Rodrigue KPOGLI

Secrétaire Général de la J.U.D.A

http://lajuda.blogspot.com

samedi 6 septembre 2008

Sous le pouvoir actuel, la réconciliation n’aura pas lieu au Togo.

L’Accord politique dit global a recommandé la lutte contre l’impunité pour parvenir à la réconciliation au Togo. Depuis quelques mois, le clan au pouvoir dans sa duplicité naturelle, ruse en agitant une Commission Vérité et Réconciliation aux yeux volontairement malvoyants de la soi-disant communauté internationale. Le peuple togolais, lui, assiste impuissant, et à la limite indifférent, à ce cynique spectacle.

Pour la Jeunesse Unie pour la Démocratie en Afrique (J.U.D.A), aucun processus de réconciliation n’aboutira au Togo sous la présidence actuelle, véritable annexe du ministère de la défense. Mais au-delà de cette situation, il existe d’autres raisons pour lesquelles on peut légitimement conclure que le pouvoir togolais est en train de faire diversion.

1- Le processus de réconciliation est présenté comme une affaire exclusivement togo-togolaise. Comme si des forces extérieures n’ont eu aucune responsabilité dans les drames successifs dont le peuple togolais a été victime depuis l’assassinat de Sylvanus Olympio ou depuis 1958 selon « l ’Accord politique Global ». Pourtant, cette conception de la réconciliation aurait été bénéfique pour le peuple togolais si au moins, le pouvoir en place avait été au service des intérêts togolais et disposé à promouvoir un véritable consensus national.

2- A la mort d’Eyadèma Gnassingbé, la France[1] avait dépêché une mission de la Direction Générale de la Sécurité Extérieure (DGSE) au Togo pour piller les archives et y soustraire tous les documents compromettant pour les régimes successifs de la France depuis 1963[2]. Une des étapes fondamentales de la réconciliation, c’est la découverte de la vérité sur les violations des droits des citoyens, leurs auteurs et leurs motivations. En somme, l’établissement de la vérité sur tout ce qui s’est passé. L’accès aux archives est une condition sine qua non dans la mise en exergue de cette vérité. En soustrayant donc ces archives, la France efface une partie non négligeable de cette vérité dont l’éclosion est indispensable pour une véritable réconciliation au Togo.

3- L’Allemagne a certainement enquêté et découvert les auteurs de l’incendie de l’Institut Goethe le 28 avril 2005. Mais, à ce jour, elle n’a pas officiellement demandé l’arrestation de ces criminels. Pourquoi ? Evidemment parce que ces derniers sont du côté du pouvoir et donc amis de la France. Ainsi, au nom de la règle « les amis de mon ami, sont mes amis », du partenariat franco-allemand depuis la fin de la seconde guerre mondiale, et de l’importance du couple franco-allemand dans la construction européenne, l’Allemagne a dû fermer cette parenthèse. Si les pyromanes avaient été du côté de l’opposition, nulle doute que Berlin les aurait fait arrêter, juger et condamner.
Si l’Allemagne - qu’on dit soutenir le mouvement démocratique au Togo à l’opposé de la France - avait inquiété les auteurs de cet incendie, on aurait pu espérer que la lutte contre l’impunité, avait débuté. En ne le faisant pas, les autorités berlinoises jouent leurs intérêts tout comme la France, au détriment du peuple togolais.

4- En novembre 2004, lors d’une audience de la délégation de l'Union Européenne relative à l’arrestation d’un des animateurs du mouvement estudiantin, le responsable nous pose cette question: que pensez-vous de Faure Gnassingbé? Etonné, nous avions dit que si la question était de savoir si Faure Gnassingbé pouvait diriger le Togo après son papa, le problème ne se posait pas puisque nous sommes dans une république avec une Constitution et non en monarchie héréditaire[3]. Quelques mois plus tard, Gnassingbé-père mourut et son fils lui succéda. Cela signifie que même avant la mort d'Eyadéma Gnassingbé, son successeur était déjà tout désigné à l'insu de notre peuple. Le reste ne relèvera que des formalités d'usage.

5- Le processus de la réconciliation est « accompagné » par le HCDH au Togo (Haut Commissariat de l’ONU aux Droits de l’Homme). Son représentant, Musa Yarro Gassama, dit de son organisation qu’elle est au Togo pour accompagner le gouvernement dans la mise en oeuvre des recommandations formulées dans les différents rapports nationaux et internationaux, notamment celui sur les violences survenues lors de la présidentielle de 2005. Nous avions rencontré cette institution sur le cas d’un jeune Togolais gratuitement battu et blessé en 2007 par des gardes du corps de Kpatcha Gnassingbé. Au lieu de traiter le cas, les responsables du HCDH nous ont demandé de ne pas ébruiter l’affaire. Et lorsqu’avec l’accord de la victime que nous avions préalablement fait soigner, la J.U.D.A avait alerté l’opinion, les responsables du HCHD nous ont appelés au téléphone pour nous exprimer leur « déception » et leur « désaccord ».
Comment une telle institution peut-elle honnêtement travailler contre l’impunité et pour la réconciliation au Togo ? De plus, les relations quasi-intimes qu’entretiendraient certains responsables du HCDH avec des officiels togolais viennent créditer nos inquiétudes quant à son impartialité.

Il apparaît alors clair que les criminels au pouvoir au Togo, avec la bénédiction des puissances étrangères, ne peuvent conduire valablement le processus de réconciliation. Misant sur le temps, tout ce qui est fait actuellement est destiné à créer l’illusion populaire. La réconciliation n’aura pas lieu sous ce pouvoir qui, loin d’être une transition démocratique, est un rajeunissement de la tyrannie. C’est pourquoi, la réconciliation passe nécessairement par l’avènement d’un régime démocratique soucieux des intérêts du Togo, et par l’accès complet aux archives pour découvrir qui au Togo et à l’étranger a voulu que le peuple vive ces différents drames et pour quelles raisons. Cela suppose un travail acharné d’un mouvement démocratique réorganisé, restructuré, pourvu de moyens efficaces [4], et capable d’élaborer les stratégies les plus victorieuses à moyen ou long terme.

Rodrigue KPOGLI


[1] Il a été rapporté à la J.U.D.A et à d’autres organisations membres du CASCOST que les forces françaises ont été vues aux côtés des Forces armées Togolaises, patrouillant dans les rues de Lomé. Le Ministre de la coopération d’alors Michel Barnier avait farouchement nié cette information et avait traité ceux qui disaient cela de « menteurs » sur RFI.

[2] Des archives gênantes pour la France au Togo in « Canard Enchaîné » du 04 mai 2005.

[3] http://lajuda.blogspot.com/2008/04/27-avril-1958-27-avril-2008-50-ans-de.html

[4] Voir Communication de Rodrigue KPOGLI, Secrétaire Général de la J.U.D.A lors de la rencontre du MDTE à Paris le 29 Décembre 2007 sur http://lajuda.blogspot.com/2008/01/compte-rendu-de-la-recontre-de-paris.html

mardi 2 septembre 2008

Armes illégales, le documentaire choc


« Les armes légères (ou armes de poing) tuent mille personnes par jour dans le monde », expliquent Paul Moreira et David André dans leur documentaire Armes, trafic et raison d’Etat, diffusé mardi 2 septembre sur Arte (à l’issue de cette diffusion, Paul Moreira et David André seront sur Arte pour un Chat en direct) .

Ces deux journalistes d’investigation ont mené une enquête passionnante sur le trafic des armes en circulation sur la planète (plus de 700 millions pour 14 milliards de balles produites), une enquête qui les mène de l’Afrique à l’Europe, en passant par l’ancienne Union soviétique, les Etats-Unis et le siège de l’ONU.

Amnesty International et Oxfam, via le programme Control Arms, visent à enrayer ce funeste trafic qui a déjà causé cinq millions de morts civils, rien qu’en République du Congo, et rapporte 1 200 milliards de dollars par an. Control Arms c’est une équipe d’enquêteurs minutieux qui, grâce à l’aide d’humanitaires et de reporters en place sur le terrain, possèdent une incroyable base de données leur permettant de tracer le cheminement de ces armes, du producteur au « consommateur ».

D’aucuns penseront que le combat que mène Control Arms est illusoire, utopique, voué à l’échec. Une pétition initiée par Amnesty International et Oxfam a pourtant déjà récolté un million de signatures de citoyens du monde entier. A l’ONU, 153 pays sur 192 sont déjà prêts à signer une convention internationale. Un seul Etat s’oppose fermement à cette convention : les Etats-Unis…

Paul Moreira, co-auteur du documentaire Armes, trafic et raison d’Etat, est l’invité de ces rendez-vous de l’Agora. Il répond aux questions d’Olivier Bailly.


Agoravox : Votre documentaire commence comme un film de Michael Moore. Un clin d’œil ?
Paul Moreira : Nous avons voulu commencer par cette fausse pub, en réalité un vrai clip de campagne d’Amnesty International. C’est très provocateur et ça nous replace dans notre contexte culturel, avec le téléachat. Ça dit surtout que les armes ne sont pas des produits comme les autres.

A : En quoi le commerce des armes légères représente-t-il la face cachée de la mondialisation ?
PM : Le commerce des armes légères est un excellent moyen pour découvrir les acteurs de l’ombre employés par les gouvernements. Il y a des entreprises respectables, celles qui exposent au salon Milipol, qui font appel à ce commerce. Victor Bout, dont nous parlons dans le film et qui a inspiré le personnage du film Lord of War, est l’exemple type de la face cachée de la mondialisation. C’est une espèce de FedEx de l’ombre qui a accès aux armes de l’ancien bloc de l’Est. Ce genre de personnages, ce ne sont pas forcément des gens qui font partie de l’univers criminel. Parfois les Etats, pour des missions noires ou grises, font appel à eux.

A : Quels sont les pays émergents à la pointe de ce commerce ?
PM : La Chine, l’Inde, l’Egypte principalement.

A : Est-ce que des Etats peuvent aller jusqu’à vendre des armes à des guérillas qui leur sont hostiles ?
PM : Pour ce documentaire, nous n’en avons pas rencontré, mais d’une certaine manière pour la guerre de l’Angola, les Etats occidentaux ont armé les deux côtés. On sait que Jonas Savimbi, le chef de l’Unita, a été soutenu par les Américains. Il arrive que dans des conflits extérieurs on entretienne les deux camps. Au Congo, si on simplifie, on a une milice armée par le Rwanda (Laurent Kunda) et il y a d’autres groupes armés qui s’opposent.

A : Qu’est-ce qui se joue, régionalement et internationalement, au Congo ?
PM : Au Congo, les réserves minières sont très importantes et le pays qui contrôle ces ressources c’est le Rwanda. Le Rwanda contrôle le Nord-Kivu, c’est-à-dire l’est du Congo. Les relations des grandes puissances occidentales avec ces pays sont opportunistes. Prenez la Banro Congo Mining, qui est une filiale de l’entreprise canadienne Banro Corporation au conseil d’administration de laquelle on trouve des membres du gouvernement Bush. Leur intérêt c’est de pouvoir continuer à travailler en sécurité. Donc ils n’ont pas intérêt à avoir des ennemis locaux. C’est leur pouvoir de nuisance qui font la puissance de ces groupes armés. Au Congo, l’idée du traité de paix initial était bonne, mais elle a abouti à un vrai-faux processus de paix. L’ONU a dit « puisque c’est la paix, on va mixer les milices existantes dans l’armée congolaise ». Sauf que les milices sont restées fidèles à leurs premiers engagements…

A : Vous mettez en cause le groupe Bolloré, dont une filiale est installée en République du Congo. Y a-t-il eu des pressions de certains groupes pour que le documentaire ne passe pas sur Arte ?
PM : Non, pas du tout. D’ailleurs on n’accuse pas le groupe Bolloré de transporter des armes. Ce qu’on dit c’est que le commerce de minerais entretient la vente d’armes. C’est pourquoi l’ONU avait demandé au groupe Bolloré de se désengager du Congo, de ne pas investir dans la région. Ce qu’il y a de choquant c’est que la boîte de Bolloré que nous filmons sur place n’a jamais voulu rencontrer les gens de l’ONU.

Nous les avons filmés par hasard. Je faisais un plein d’essence. J’ai vu une société de transport du groupe Bolloré qui jouxte une entreprise de Minerais. J’ai filmé, je me suis dit que ça pourrait faire un plan intéressant. J’avais fait le plein et ça klaxonnait derrière, ce qui est assez fréquent dans les villes africaines, donc je n’y faisais pas attention. En fait, c’est moi qu’on klaxonnait. Derrière, il y avait deux types, un Noir et un Blanc. Ce dernier, dès que ça a commencé à tourner au scandale, s’est éclipsé. Il avait un accent sud-africain. L’autre était, si je me souviens bien, capitaine. Il avait une montre en or, ce qui prouve, dans ce pays ultra-miséreux, qu’il s’agissait d’un profiteur de guerre. D’après ce qu’on m’a dit par la suite, il n’est pas improbable que c’est un des gendarmes qui dirige une brigade chargée de protéger une mine. Et là, on est à trois heures du Rwanda… Il voulait m’embarquer. J’étais parti pour le poste, avec confiscation des caméras, ce qui aurait été le cauchemar. Et c’est là que je me suis aperçu combien les comptoirs de minerais étaient des lieux stratégiques.


A : Darfour, République démocratique du Congo, Guinée Conakry… Votre documentaire aborde essentiellement l’Afrique. Est-ce le continent le plus touché par ce commerce ?
PM : Nous aurions pu aller sur d’autres continents. L’enjeu c’est le minerai. Les armes affluent beaucoup où il y a des mines d’exploitation de minerais. Mais on aurait pu parler de l’Irak où, en 2007, 200 000 fusils d’assaut livrés par les Etats-Unis ont mystérieusement disparu…

A : Autre exemple cité dans votre documentaire : la Guinée, pays où sévit le dictateur Lansana Conté et qui a été le théâtre d’une très féroce répression de la part des troupes gouvernementales, en 2007 contre des manifestants pacifistes. Là, il n’est pas question de minerai.
PM : Non. La France vend des munitions à la Guinée, mais elle ne pouvait pas savoir que le gouvernement guinéen tirerait sur des civils… Maintenant, c’est vrai, elle le sait. Nous avons cherché à joindre pendant un mois le ministère des Affaires étrangères. On a eu quelqu’un qui nous a donné un chiffre concernant ces ventes de munition, dix fois inférieures aux registres des douanes vérifiés par l’ONU… A partir du moment où on a fait état de cette information, on n’a plus jamais eu de contact avec un officiel français.

En écho, m’est revenu le discours de Dakar de Nicolas Sarkozy - en fait le discours de Guaino - qui évoquait l’homme africain qui n’était pas entré dans l’Histoire. Là, en Guinée, des hommes sont dans l’Histoire, demandent des conditions de vie meilleures et on leur tire dessus avec des munitions vendues par la France.

A : Dans votre documentaire vous évoquez le travail de Control Arms. De quoi s’agit-il ?
PM : C’est une plate-forme principalement contrôlée par deux ONG, Amnesty International et Oxfam auxquels des bénévoles de tous les continents contribuent. Ça me semblait important d’avoir cet élément humain dans le documentaire. Ils ont très peu de moyen. Ils sont aidés par des humanitaires, des journalistes, etc. qui leur envoie des photos d’armes prises sur le terrain qui permettent d’enquêter sur leurs origines. Les enquêteurs de Control Arms sont très bons en ce qui concerne les bases de données. Ils arrivent à tracer la provenance des armes.

A : Y a-t-il des Etats derrière Control Arms ?
PM : Certains de leurs enquêteurs ont de très bons rapports avec des membres de gouvernements, en Grande-Bretagne, notamment. Ils sont très respectés. Le militantisme français, c’est par exemple Robert Ménard qui va gueuler, passer à la télé, exagérer un peu pourvu que ça serve le combat. Chez les Anglo-Saxons, précisément chez Amnesty, ce sont encore plus que des journalistes d’investigation ! Pour ce reportage, il a été plus facile d’avoir accès aux milices du Congo que de gagner leur confiance. Ils sont très embêtants pour les Américains ! Ils sont aussi du bon côté de la morale. Brian Wood, qui dirige les enquêtes, je le trouve assez fascinant, on dirait un personnage de John Le Carré ! Ces gens-là ne pensent pas qu’on arrivera un jour à supprimer le commerce des armes, mais ils combattent, ce sont des idéalistes indécrottables et c’est assez plaisant.

A : Vous consacrez une partie de votre documentaire à John Bolton, ancien ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU, qui représente un courant très conservateur. C’est un ami de la NRA (groupe qui exerce un puissant lobbying à l’ONU) qui aimerait que le monde ressemble aux Etats-Unis, c’est-à-dire que chaque individu puisse s’armer librement.
PM : John Bolton a été placé à l’Onu par Bush pour démanteler les traités multilatéraux, comme par exemple Kyoto ou le Tribunal pénal international. Ce que prouve ce film c’est que les Etats-Unis sont le pays le moins mondialiste ou le moins internationaliste qui soit. Ils se considèrent comme la dernière grande puissance. Ils ne veulent pas de traité sur le commerce des armes légères. Les Américains sont très différents des Européens : les Européens s’engagent, mais en douce vendent des armes illégalement, comme c’est le cas de la France avec la Guinée.

Les Etats-Unis respectent les lois. S’ils s’engagent, ils savent qu’il y aura un appareil de contrôle de leur engagement, ce qui n’existe pas en Europe. Les Etats-Unis veulent préserver leur capacité à armer leurs milices qui sur le terrain font le boulot à leur place, ce qui permet de ne pas engager leurs hommes. C’est ce qui s’est passé avec les Contras au Nicaragua. C’est également ce qui s’est passé en Afghanistan quand ils ont armé les seigneurs de la guerre entre 2001 et 2004.

A : Que vous a appris ce documentaire ?
PM : Ce que m’a appris ce documentaire, c’est qu’une bonne arme ne meurt jamais. Dans les conflits que nous évoquons, il y a des armes qui ont 40 ou 50 ans. Souvenons-nous que le chef de guerre Gulbuddine Hekmatyar, qui en 2007 a prétendu avoir aidé Ben Ladden à s’évader de Tora Bora, a été armé massivement dans les années 80 par les Etats-Unis à l’époque de la guerre contre l’Union soviétique…


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