Intronisé nuitamment le 5 février 2005 à la mort de son feu père Gnassingbé 1er qui a régenté effectivement le territoire du Togo durant 39 ans, Gnassingbé 2 n’envisage, pour rien au monde, lâcher le trône qu’il occupe illégitimement et illégalement. Avec une froideur de monstre, Gnassingbé 2 entend poursuivre et approfondir l’entreprise coloniale pour laquelle sont destinés tous les despotes obscurs africains abusivement appelés « dirigeants africains ». Et il dispose des atouts énormes pour ce faire.
S’il existe des africains du territoire du Togo qui, dans le contexte actuel, rêvent de l’avènement d’un nouveau visage -rien de plus-, ils feraient mieux de tôt revenir à la réalité. Une telle démarche leur éviterait non seulement d’être désabusés et surtout elle leur épargnerait un arrêt cardiaque fatal, si tant est que, dans le cadre colonial qui est le nôtre, il vaut mieux être là que mourir.
S’il
est une leçon que l’on doit retenir de toutes ces années sous Gnassingbé 1er
et 2ème c’est qu’à trop vouloir mépriser l’adversaire, on finit par
le subir durablement. Un adversaire doit être minutieusement analysé aussi bien
dans ce qu’il a comme forces que comme faiblesses. C’est le seul gage pour pouvoir
se faire une juste opinion de ce qu’il est réellement, et forger en conséquence
ses propres armes. En lieu et place de ce travail certes harassant mais
salvateur, on s’est contenté dans le territoire du Togo de formules, de slogans
et d’invectives dont l’inanité et la stérilité, à l’épreuve du temps, ne sont plus
à démontrer. Quant à tous les esprits, lisant la situation sur la triple
temporalité : court terme, moyen terme et long terme, qui prescrivent des
actions à trois étages conformément à celle-ci, s’ils ne sont pas publiquement
injuriés par celles et ceux qui se proclament « les vrais
opposants », ils sont sommés de se taire et de rejoindre le RPT (renommé UNIR)
dont ils seraient des agents secrets, ou ils sont tout simplement ignorés et
ridiculisés.
Aussi
bien les armes des Gnassingbé que la plume et le verbe des
« opposants » ont paralysé la résistance
La
résistance contre le système colonial au Togo n’a pas seulement été victime de
la répression sanglante commise par le pouvoir et ses corps officiels et non
officiels. Elle a aussi, et même plus encore, été désarticulée par la plume et
la parole au sein même des rangs de ceux qui prétendent l’incarner. Des mots
assassins écrits ou dits par certains « opposants » sur d’autres
« opposants » qui à leurs yeux ne le seraient pas vraiment, ont ruiné
non seulement certaines belles idées à peine évoquées, détruit des
personnalités, avorté des tentatives de construction de réseaux de travail,
découragé des initiatives, freiné des ardeurs promises à des lendemains
fructueux, planté des ressentiments dans certains cœurs et surtout empêché l’éclosion de nouvelles têtes dissuadées d'office. Car, il n’est pas facile de
supporter et de faire supporter à ses proches des injures gratuites, des
calomnies, des anathèmes, des torrents de boue, des boules puantes, des
critiques infondées et surtout des attaques en dessous de la ceinture parce
qu’on daigne consacrer une partie de son temps à réfléchir sur un problème
collectif et à partager avec les autres les fruits de ses réflexions.
« L’opposition », entendu ici au sens large et dans son expression
intellectuelle, a donc participé à la destruction de la résistance. Certains
ont même estimé que pour parvenir à affronter efficacement les Gnassingbé et
tous leurs alliés intérieurs et étrangers, il ne faut pas rassembler et
additionner les forces semblables, mais plutôt opérer par soustraction et
division. Ainsi, certains « vrais opposants » ont-ils utilisé la
plume, la parole, et internet pour édifier énergiquement un vide en affublant
des gens dont la présence leur fait de l’ombre, ou les énerve des qualificatifs
les plus détestables. Et quand ces instaurateurs du vide se retrouvent seuls au
devant des lumières qu’ils convoitaient, ils commencent à chanter l’urgence de l’unité
qu’ils viennent pourtant de détruire en faisant du « tout pour que mon
frère tombe et que je prenne sa place ». A l’heure du compte, chacun, en
son âme et conscience, doit se questionner sur sa responsabilité dans la
tranquillité dont jouit Gnassingbé 2 dans un pays qu’il méprise et qui ne le
porte pas à son tour dans son cœur. En se disqualifiant les uns et les autres,
les « résistants » ont créé dans leurs propres rangs un vide et du désarroi
dans les populations qui ne croient plus beaucoup en la parole politique et
citoyenne.
Le
constat est sans appel. Aujourd’hui, Gnassingbé 2, et nous l’avons affirmé à
plusieurs reprises, dispose des moyens de son pouvoir… de nuisances. Et rien,
pour le moment, n’est à l’horizon pour contrer sa volonté de continuer à le
déployer.
Les
pays étrangers aux côtés des forces immobilisatrices en Afrique
Il
dispose de l’appui de l’étranger, à commencer par la France. La Chine qui vient
offrir une façade de grands travaux aux différents despotes obscurs africains –
et donc à celui du Togo – renforce cet appui. Dans une atmosphère
internationale enrhumée par des crises systémiques, et où tous les pays adultes
et prescripteurs de la norme internationale formulent publiquement leur
décision de tenir encore plus fermement le continent africain, il est tout à
fait prévisible que les forces immobilisatrices incarnées, au premier chef, par
les despotes obscurs africains aient de plus en plus la côte, et soient l’objet
de soutiens plus poussés face aux populations paralysées à la base par les deux
vecteurs de puissance que sont l’Ecole et les Religions importées. L’Afrique
reste un double réservoir diplomatique et économique : réservoir de voix
pour les pays adultes dans les instances internationales, et réservoir de
matières premières minières, minéralières, agricoles voire de main-d’œuvre
corvéable à merci pour tout pays en quête de croissance économique. Ainsi, pendant
que les dominants traditionnels renforcent leur présence en Afrique, tout en
travaillant nuit et jour pour trouver les voies et moyens encore plus efficaces
pour l’approfondir (voir, à titre indicatif, les rapports publiés en France par
la Commission Jean-Marie Bockel et la Commission Hubert Védrine sur l’Afrique),
les nouveaux venus et ceux qui y reviennent tirent les enseignements des
relations que les premiers ont eu et continuent d’entretenir sur le continent. Suivant
le raisonnement de ces derniers, exactement dans les pas des premiers, en
Afrique, moins le régime est en harmonie avec les populations locales, plus il
est antipatriotique et dépendant de l’extérieur qui le tient et le maintient face
aux populations, mieux c’est. Car, avec un tel gouvernement, il est possible
d’obtenir le plus de concessions, à la condition de lui garantir sa survie
contre vents et marrées tant financièrement que militairement. Gnassingbé 2 est
l’un des prototypes les plus aboutis de cette race de despotes obscurs
qu’affectionnent le FMI, la Banque Mondiale, la France, les USA, Israël, les
monarchies du Golfe, les syndicats locaux appelés pompeusement « ensembles régionaux », ainsi que
dans un jeu d’intérêts, ceux qu’on nomme les « émergents ».
La
violence étatique, l’atout maître
En
plus, Gnassingbé 2 a entre ses mains tous les instruments de la violence
étatique : armée et police. Celles-ci sont, en cas de nécessité, appuyées
par une réserve de miliciens dont la sauvagerie le dispute à celle des corps
officiels. Dans le dispositif colonial, les forces de la violence étatique ont
un rôle principal : terroriser la masse, dissuader tout contestataire
d’aller au-delà d’un certain seuil, et ainsi sécuriser et garantir la pérennité
de la gouvernance coloniale. Depuis l’assassinat de Sylvanus Olympio, puis la
prise effective du pouvoir par Gnassingbé 1er, les forces de la violence
officielle jouent à merveille leur rôle. Régulièrement, elles plongent le
territoire dans le bain de sang afin de couper le souffle à tout élan populaire
qui pointe le bout de son nez. La fidélité de l’institution militaire
tribalisée surtout au sommet et en chaînon central donne, jusqu’à la preuve du
contraire, une sourde assurance à Gnassingbé 2 de forcer le passage, de
franchir le cap de 2015 et aller au-delà.
Quand
la jeunesse togolaise donne un coup de main
La
jeunesse togolaise est l’autre atout qu’il a. Quand on voit l’état pitoyable
dans lequel se trouve la jeunesse togolaise, la partie présumée la plus vivante
de la population, Gnassingbé 2 peut s’estimer heureux et rêver d’un destin
identique à celui de son feu père. En effet, la jeunesse togolaise est laminée
complètement. Elle a le souffle coupé et la tête violemment tournée vers
d’autres cieux. Le tribut qu’elle a payé dans son engagement contre les
Gnassingbé et leurs mentors est lourd. La taille du gain, au final, ne la
convainc – à tort ou à raison, c’est selon ! - de l’utilité de continuer la
bataille. En tous les cas, une partie de cette jeunesse souhaite avoir d’autres
moyens pour ce faire.
Même
s’il y a quelques têtes qui s’efforcent de faire mine de croire à l’existence
d’une lutte de libération au Togo, il faut dire que la majorité écrasante ne
croit plus. Elle a abdiqué et se contente de chercher les miettes pour la
survie quotidienne. Imprégnée des principes de l’école coloniale et des
religions imposées en Afrique, cette jeunesse n’a jamais eu l’opportunité de
découvrir ce qu’est réellement son histoire, le monde dans lequel elle vit, les
forces et lois qui président aux destinées des peuples, ainsi que les règles
qui gouvernent la lutte pour la vie entre les sociétés humaines. Lorsqu’on essaie
de la confronter à ces phénomènes pourtant vivifiants, de la pousser à la
profondeur d’analyse et de lui faire assumer ses responsabilités historiques,
elle n’en confère que peu d’intérêt et s’en lasse très vite. Tellement ses
terrains de prédiction qui sont le jeu, le manque de gravité, la dispersion,
les fantasmes, l’individualisme le plus squelettique, les plans de carrière
personnels, et une certaine idée de l’acquisition de la richesse sont
prégnants.
Une
bonne part, pour ne pas dire tous, des éléments les plus conscients de la
jeunesse sont à l’extérieur. Peu sont disposés à « perdre leur temps »
depuis leur lieu de résidence dans un quelconque activisme dont ils perdu les
réflexes, soit pour avoir trop donné contre rien ou si peu, soit sur le coup
des difficultés et des désillusions liées à leur statut en territoire étranger,
soit parce qu’ils ont atteint un niveau de confort en terre étrangère qui
efface peu à peu de l’esprit le besoin d’un foyer national. Ceci ne peut que
déterminer Gnassingbé 2 à aller de l’avant.
L’Opposition :
un atout et non des moindres
Ce
qui se nomme « l’Opposition » est à son tour un atout pour Gnassingbé
2. Après le second braquage électoral de Gnassingbé 2 en 2010 et le coup de
maître de la Françafrique qui a réussi à fragmenter l’Union des forces du
changement (UFC) en deux blocs antagonistes, « l’Opposition » n’est
plus que l’ombre d’elle-même. Gilchrist Olympio, dans une démarche unipersonnelle
et unijambiste, a soi-disant négocié un accord de « partage du pouvoir »
avec Gnassingbé 2 et a fini encore plus diminué. Cette attitude, pour le moins, renversante, a douché froidement une immense majorité de togolais qui ne
juraient que par la personne du fils du président Sylvanus Olympio. Le coup porté
au moral populaire par ce renversement est énorme et ses séquelles,
paralysantes. L’autre bloc a, quant à
lui, créé l’Alliance nationale pour le changement (ANC) et s’illustre depuis
lors plutôt dans le bruit et l’agitation que dans une réflexion calme et froide sur la
situation. Même si certains peuvent se féliciter, dans un joyeux minimalisme,
que l’ANC et ses alliés tiennent malgré tout, on doit reconnaître que tout ceci
n’est pas à la hauteur du défi global.
Aussi
bien dans l’énoncé du problème que dans la formulation des solutions, ce qui
s’attribue le qualificatif de « l’Opposition » pèche, soit par
ignorance, soit par naïveté, soit par excès de confiance en ses propres
capacités. Elle se surestime. Elle sous-estime l’adversaire et méconnaît ses
alliances réelles et potentielles. Qui, ayant étudié minutieusement le monde
dans lequel nous sommes et un peu l’histoire du peuple noir, peut comprendre
qu’on mêle dans une lutte de libération (à moins qu’on lutte pour autre chose),
l’Eglise, les Ambassades, l’Union européenne et toutes les institutions du
genre? Pourtant, un jour c’est Monseigneur Barrigah et un autre jour ce sont les
méthodistes… Un jour c’est l’ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique, et un autre
jour c’est le représentant de l’Union européenne, stricts représentants des
intérêts des entités qu’ils incarnent auprès du régime en place…Un jour c’est « la
communauté internationale », un autre jour c’est l’ONU… Plus grave encore,
qui peut comprendre qu’on fasse régulièrement et tambour battant le
« grand » périple des capitales occidentales affirmant à qui veut
l’entendre être en « tournée d’explication » aux « grands
blancs » de Paris, de Bruxelles, de Berne, de Washington qui ne seraient
pas au courant de ce qui se passe au Togo ? Drôle de conception du monde
où les dominés prétendent expliquer à leurs dominateurs, le système dont ils
sont les concepteurs. On appelle cette surprenante pratique, du
« lobbying ». Si seulement on savait combien les « grands
blancs » se foutent royalement de ce que les « nègres »
souffrent et meurent sur leur terre qu’ils sont incapables de défendre
eux-mêmes !
Ce
qui se proclame aujourd’hui la « vraie Opposition » n’a jamais fait
l’état des lieux de ses forces et faiblesses, pas plus que le bilan de tout ce
qui s’est passé depuis au moins deux décennies sous ses auspices. Minée par des
conflits interpersonnels de bas étage, elle s’entredéchire actuellement sur le
trophée sans gloire du « chef de l’opposition ». Si les voies et
moyens qu’elle entend utiliser pour obtenir le « changement » sont plus
que flous, sinon mystérieux, la société qu’elle entend construire après
l’entreprise coloniale franco-gnassingbéenne, dans un monde aussi impitoyable,
se résume en des concepts bateaux. Pour elle, tout ceci relève de « la
stratégie qu’on ne dévoile pas en public ». Elle ne s’autocritique presque
jamais et n’accepte pas que des citoyens qui, comme eux, aiment leur territoire, émettent la moindre
réserve sur l’efficacité de ses actions, pour ne pas dire, ses démonstrations.
Devant la foule des petits jours au bord de la mer, où les rieurs ont remplacé
les penseurs et où parfois des gens valeureux dont l’engagement n’est plus à
démontrer côtoient des transfuges de la dernière heure, zélés comme de nouveaux
convertis, et autres intermittents du spectacle du samedi, ceux qui ont eu le
malheur dans les jours précédents d’avoir osé une opinion critique sur le
clergé-opposant sont lynchés et ridiculisés sous les applaudissements et les
hourra.
Les
jeunes recrues au costume taillé sur mesure
Un
autre atout de Gnassingbé 2 se trouve dans sa stratégie consistant à faire
venir dans sa cour quelques jeunes loups. Le recrutement de ce nouveau personnel
continue d’ailleurs. Il s’agit de renouveler les collaborateurs et les
courtisans et de dissimuler ceux qui avaient servi sous son feu père, relégués
au rang de conseillers de l’ombre ou purement et simplement écartés. Si on peut
dire que ces jeunes recrues n’impressionnent pas trop la population, on peut
néanmoins constater qu’ils apportent à Gnassingbé 2 des idées…machiavéliques,
de l’énergie et surtout leur image dont il a grand besoin dans la phase qui la
sienne aujourd’hui. Ces jeunes loups, le costume taillé sur mesure, le verbe
néolibéral acquis dans des universités occidentales ou locales savent
parfaitement manier la langue de bois et savent vendre leurs produits. Certains
parmi eux savent s’emparer de certains sujets de fond tels que le Franc CFA
qu’ils critiquent à souhait. Ce dédoublement parfaitement exécuté a le mérite
de brouiller les pistes et, au passage, de grappiller quelques soutiens ou
d’amoindrir quelques critiques dans des milieux dits de Renaissance africaine.
La
« diaspora » entre désorganisation et indifférence mord petit-à-petit
à l’appât
Ce discours
volontariste qui relève, en réalité, de la pure tactique politicienne est en
train de faire mouche actuellement dans une frange de ce qu’on appelle
pompeusement « la diaspora togolaise ». Les rares organisations qui,
en son sein, essayaient péniblement de construire une conscience politique, puis
une force capable d’aider au renversement de l’ordre colonial et de contribuer
à la construction d’un Togo nouveau dans une Afrique nouvelle, sont
progressivement noyautées et désarmées de l’intérieur par des individus séduits
par le discours développementaliste de la cour de Gnassingbé 2. Ainsi, voit-on
émerger des éléments de langage tels que : « diaspora de
proposition », « contribuer au développement socio-économique du
pays », « diaspora apolitique », « diaspora de
rassemblement de tous les togolais sans considération de
partis »... Progressivement, les voix les plus lucides sont éteintes,
écartées ou isolées. Désormais les choses se font entre gens de bonne
compagnie, sans anicroches. On parle bien, suavement et on « fait des
propositions concrètes » loin des « grandes gueules » qui
frustraient tant de gens. C’est le printemps de la « diaspora des
bâtisseurs ». Mais ce travail de sape ne s’arrête pas là. Dans cette
« diaspora », à l’indifférence, à l’esprit fêtard, au
je-m’en-foutisme éternel ou au plan de carrière individuel qui éloigne de tout
activisme en direction du pays des uns qui ne se sentent pas concernés par
l’avenir du territoire natal viennent s’ajouter la lassitude, le dégoût et la dispersion des
autres qui, dans un passé plus ou moins récent, ont montré que l’éloignement du
territoire ne signifie pas la fin de leurs devoirs patriotiques.
La
presse courtisane dans ses œuvres commerciales
Dans la même veine, Gnassingbé 2 a activement
travaillé depuis 2005 et réussi à retourner en sa faveur certains journalistes
de la presse dite indépendante. Ceux-ci sont devenus, en tous les cas après
2010, des porte-paroles dévoués de la Cour.
Faisant semblant d’être toujours au service de la vérité des faits, ces
commerçants de la plume et de la voix ne cessent de cirer les pompes à leur
généreux donateur qu’est Gnassingbé 2. Dans la presse écrite, à la radio, à la
télé, à l’intérieur ou à l’étranger, ces commerçants ne font pas dans le détail.
Partout voient-ils « un changement historique au Togo », « une
rupture avec l’ancien régime », « Un Togo en évolution
vertigineuse », « un pays en chantier qui a besoin de calme sous le
chef de l’Etat pour aller encore plus loin dans le développement »…Aussi
les rencontre-t-on à Genève, à Bruxelles, à Paris, à New York…en train de
promouvoir les nouveaux habits du système Gnassingbé qu’ils défendent becs et
ongles. C’est dire combien le métier de courtisan a de l’avenir sous ces cieux.
On ne peut qu’être d’accord avec Fenélon pour qui, « les esprits les plus courts et les plus corrompus sont
souvent ceux qui apprennent le mieux cet indigne métier. Ce métier gâte tous
les autres : le médecin néglige la médecine ; le prélat oublie les devoirs de
son ministère ; le général d'armée songe bien plus à faire sa cour qu'à
défendre l'État ; l'ambassadeur négocie bien plus pour ses propres intérêts à
la cour de son maître, qu'il ne négocie pour les véritables intérêts de
son maître à la cour où il est envoyé. L'art de faire sa cour gâte les hommes
de toutes les professions, et étouffe le vrai mérite. » On ne peut rien
dire de plus, si ce n’est qu’avec le métier de courtisan, le journaliste oublie
les faits et surtout les souffrances des populations.
Le moteur de la machine à
fraude
Au-delà de tout ce qui vient d’être dit,
Gnassingbé 2 mise sur la puissante machine à fraude installée depuis les années
de son feu père et le sentiment général de lassitude, du déjà-vu, du
déjà-entendu que n’importe quel observateur peut percevoir dans la population.
Ce sentiment est de loin l’atout le plus sérieux dont Gnassingbé 2 dispose dans
sa mission. La guerre psychologique dont nous parlons sans cesse est en train
d’atteindre son résultat. Le moral populaire manifestement touché, est poussé à
abdiquer et à se chercher son pain quotidien qu’à vouloir suivre ce qu’il est
convenu d’appeler les politiciens.
Au terme de ce parcours, on est bien
obligé de constater que rien ne se dresse sur la route de Gnassingbé 2. Il
franchira le cap de 2015 avec autant de facilité que son feu père avait passé 40
ans à la tête du territoire du Togo. A moins qu’il y ait un sursaut de dernière
minute de la jeunesse. Existe-t-il une génération spontanée ? L’expérience
a prouvé que non. Mais là, nous sommes condamnés à l’exploit si nous ne voulons
pas subir davantage.
On
agit comme on réfléchit. Aujourd’hui les résultats de nos actions sont là,
devant nous. Il faut les apprécier et voir si, au préalable, nous avons
collectivement pris la mesure de ce que signifie réellement le combat que
doivent mener tous les territoires d’Afrique en vue de la renaissance des
africains.
Une
nouvelle génération qui tarde à naître
En élargissant notre
perspective, il faut dire que si, malgré notre situation actuelle et à venir
prévisible, une nouvelle génération d'Africains refuse de naître pour prendre
le contrôle du continent et réorienter le plus vite possible son énergie, les
Africains, dans leur ensemble, découvriront que le cadre international qui va
naître de la confrontation ou de la coopération entre les Occidentaux pilotés par
les USA et les Asiatiques, plus précisément la Chine et ses alliés - les
Russes, les Japonais et, peut-être les Indiens pouvant ou non prendre position
pour l'un ou l'autre des deux camps - leur sera encore plus défavorable. La
bagarre entre Etats fait rage, sous nos yeux et seuls ceux qui ont les reins
solides survivront. Les enclos coloniaux abusivement appelés "Etats
africains" construits de l'extérieur à la Conférence de Berlin (1884-1885)
et confirmés en 1963 à Addis Ababa, dans leur rôle par une Organisation de
l'Unité Africaine ne réunissent pas les critères minimaux d'Etats pouvant, dans
ce contexte, conduire les Africains à bon port. Ces enclos coloniaux et leurs
dirigeants fabriqués de toutes pièces et adeptes des manoeuvres dilatoires ont
présidé au déclin des Africains déjà traumatisés par les épisodes sanglants des
razzias négrières et du colonialisme. Ces gens là s'écoutent parler aux
tribunes internationales à moitié vide. Personne ne les prend et ne les prendra
au sérieux. Dans les années 1970-1980, ces gens-là criaient à l'avènement d'un
Nouvel Ordre politique et économique international. Plus tard, ils se sont
réveillés, et le peuple d'Afrique avec, la tête dans l'eau et sous la botte du
FMI et de la Banque Mondiale. Ainsi, ont-ils subitement découvert l'égoïsme des
Etats sans pour autant en tirer aucune leçon. Plus tard, ils seront mangés et
les Africains avec, par l'OMC qui a remplacé le GATT. Le peuple d'Afrique s'est
alors rendu compte que le monde dans lequel ils vivent et doivent vivre est
encore plus rude que celui dont leurs despotes obscurs rêvaient avec facilité
et légèreté dans un grand bavardage collectif à la différence, par exemple, de
la Chine où des dirigeants sérieux, dans les pas de Mao Tse Tsoung,
renforçaient la maîtrise de leur espace et engageaient sans grands bruits mais
dans une ferme discipline leur peuple sur une voie des réformes
révolutionnaires fondées sur l’imposition des valeurs chinoises épurées
impitoyablement des éléments toxiques distillés par l’étranger et portés et
propagés par des seigneurs de guerre locaux. Plus une nouvelle génération
d'Africains tardera à naître, plus le risque que l'histoire se reproduise est
grand et plus des gens comme Gnassingbé 2 ont de l’avenir.
Komla KPOGLI
04 mai 2014
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