Les
idiots utiles du RPT ont-ils la solution?
« Les conséquences du
succès de cette opération de démantèlement de l’UFC ne vont se faire sentir
véritablement que lors de futurs vols électoraux du RPT. Pour expliquer ses
« prochaines victoires », Faure Gnassingbè dira ou fera dire qu'il a
réussi là où son feu père a échoué. Il a réussi lui à casser facilement « l'opposition » ;
ce que son père était incapable de faire
même à coup de fusil et de marteau. En conséquence de cette prouesse, le peuple
lui témoigne sa reconnaissance et le gratifie de 65 à 70 sièges à l'Assemblée Nationale
en 2012 et des années supplémentaires à la présidence après 2015. »
Komla KPOGLI
26 août 2010
Ces grands inquisiteurs qui traquent les mauvais esprits
Ces derniers temps, sont apparus de grands inquisiteurs qui se
sont donnés pour mission de traquer ceux qu'ils considèrent comme des mauvais
esprits, des traites qui empêchent le changement de se réaliser au Togo. Ces
grands inquisiteurs n'hésitent pas à lire dans le subconscient des individus.
Lorsqu'ils n'y trouvent rien de consistant, ils inventent toute sorte
d'histoires pour conclure que les sujets en question sont des traitres, ils
sont du RPT, ils mangent au RPT. C'est, selon eux, le coup fatal qui doit être
asséné à ces esprits malfaisants qui se cachent derrière le masque de
"démocrates" affirmés. Ici, dès qu'ils sont accusés, ces « mauvais
esprits » sont sommés à coups de fouet verbal d'avouer et d'apporter la
preuve de leur fidélité à la « lutte » pour un Togo nouveau. S'ils ne
le font pas, c'est qu'ils sont coupables et à ce titre, ils sont condamnés à
reposer dans l'étang du feu éternel.
Les grands inquisiteurs, dans leur traque, sont allés jusqu'à
faire admettre récemment que nous sommes tentés par le pouvoir et que l'envie
nous a pris de devenir ministre. Rien que ça! Nous voulons offrir le ridicule
en précisant que notre objectif est infiniment plus modeste. Il s'agit simplement d'entamer une
opération de salubrité politique consistant à faire voir à notre peuple que
nous allons en enfer si nous continuons par prétendre lutter contre ce système
de cette façon. Voilà notre motivation. Elle est plus basse que ce qu'on
avait imaginé. Cette fois-ci, ces grands inquisiteurs s'arracheront leurs
cravates puis déchireront leurs vêtements car doivent-ils se demander « il
appelait au changement de braquet rien que pour ça? Merde alors!».
Des dizaines étaient celles et ceux qui nous avaient appelés à
réagir et à publier un papier de mise au point. Mais, nous ne sommes pas de
cette espèce d'individus à répéter ce que disent les gens pour contenter la
foule. Nous ne réagissons pas sous le diktat de qui que ce soit. Ce n'est pas
parce qu'une masse de commentateurs crie au scandale que nous allons nous
mettre à courir dans tous les sens. Notre préoccupation n'est pas de ravir des
tonnerres d'applaudissements de celles et ceux qui lisent nos écrits. Nous
avons des problèmes; nous essayons de leur chercher des solutions. C'est là
notre intérêt. Dans cette quête, nous pensons par nous-mêmes. Il ne s'agit pas
pour nous d'un concours littéraire ni d'une simple joute oratoire dont l'issue
serait de connaître le meilleur orateur. Notre problème est ailleurs. Il s'agit
de sortir notre peuple définitivement
d'un régime colonial pour bâtir un Etat effectif. Cette entreprise est
suffisamment sérieuse pour ne pas être inscrite dans le registre de la
démagogie et des incantations qui, une fois en face des réalités, se
transforment en bégaiements et autres digressions.
Un discours démagogique peut
mobiliser les foules mais il ne suffit pas pour passer à l'action. Et c'est là
les limites qu'on connaît dans ce territoire. Une fois les foules mobilisées,
ne sachant dans quelle direction aller, on fait le dindon qui étale ses plumes,
tourne en rond, perd des plumes puis revient dans ses proportions. C'est la
doctrine des prétentions.
Une haine qui empêche de travailler ensemble
Une fois qu'ils reviennent dans leur lit telle une rivière après
sa crue, les mêmes qui s'étaient montrés plus que prétentieux viennent prôner
l'unité. C'est louable de parler d'unité. Seulement, la duplicité réside dans
ce que ceux qui viennent entonner le chorus de l'unité sont ceux-là même qui la
pratiquent le moins. Dans leur souci du « m'as-tu-vu? » et du
« que mon frère tombe afin que moi, je prenne sa place », beaucoup
parmi nous adorent secouer sur le seuil d'autrui la poussière de leurs
souliers. Ils en arrivent à salir les autres et à colporter sur eux des
mensonges les plus infâmes. Ils aiment casser du sucre sur le dos de ceux
qu'ils appellent encore il y a quelques minutes leurs amis ou camarades. Notre prétendue « lutte jusqu'à la
victoire finale » se déroule en réalité dans un climat délétère fait de
détestation inavouée, de petites calomnies entre « combattants » qui
s'échangent des accolades en public pour mieux cacher les coups de couteaux
qu'ils s'échangent à l'ombre. Il y a trop de haine entre nous, trop d'inimitié,
trop de cynisme, trop de querelles de bas étage, trop de coups tordus, trop
d'hypocrisie, trop d'alliances de circonstance juste pour torpiller l'autre ou
les autres. Le camp des soi-disant combattants est miné de l'intérieur. Des
sujets mineurs sont très souvent dramatisés et prennent des dimensions
inédites. D'insignifiantes affaires de moeurs en viennent à séparer des gens
qui se disent frères de combat de longue date. L'esprit de scission a élu
domicile dans nos rangs. L'esprit de factions a triomphé. En résumé, on ne
s'aime pas.
Cette ambiance négativement concurrentielle et ridiculement
haineuse handicape notre marche commune. Elle étouffe également toute oeuvre et
réflexion collectives. Au lieu d'être tournée vers l'extérieur, la débauche
d'énergie ruine à l'intérieur. Tant que ces actes et attitudes ne cesseront
pas, c'est peine perdue de vouloir créer les conditions objectives pour une
démocratie au Togo. Car, ce sont les hommes qui portent les idées et qui les
font triompher. S'ils ne s'aiment pas, s'ils ne se supportent pas, s'ils se
détestent en catimini autant oublier tout le reste.
L'enfermement dans une position figée et victimaire
Ce qui se passe est non seulement terrible pour nous mais il
l'est aussi pour les générations à venir. Nous avons réussi tout seuls à nous
enfermer dans une posture victimaire, pleurnicharde et sans issue. Cette
posture nous pousse à ne voir la solution au mal togolais que par le viseur des
armes à feu. « Aux armes! Aux
armes! Seules les armes nous sauveront!» crie-t-on. Une fois ce postulat
posé, on l'élève en doctrine inattaquable. Cette posture est sans issue tout
simplement parce qu'elle nous enferme dans l'étau des armes à feu imaginaires et
d'une rébellion armée mythique. Le fait - et nous sommes bien obligés de le
dire - est que jusqu'ici nous sommes les mains vides dans un contexte
géopolitique que visiblement nous ne comprenons pas du tout. Nous n'avons même
pas un couteau suisse. Même pas une fronde. Et pourtant, on entretient
l'illusion que les armes nous seraient fournies un jour jusqu'ici hypothétique,
par une main quasi divine.
Lorsque vous posez la question de savoir d'où viendraient les
armes, on vous répond en grattant le crâne « Euh, euh, euh, on les aura.
Vous allez voir! Un jour on les trouvera. N'y a-t-il pas au Libéria, au Sierra
Léone, en Côte d'Ivoire, au Nigeria des armes qui circulent? Eh bien on va en
acheter de ces pays-là! » Et lorsque vous poursuivez la curiosité pour
savoir d'où viendra l'argent pour cet achat, on vous dit « euh, euh, euh,
euh, on va cotiser ou bien on s'adressera à des pays ou dirigeants amis ».
« Ah bon, vous avez des alliés dans votre lutte? », « oui bien
sûr!».. « Lesquels?»... « On
va contacter X ou Y et Al Qaida au Maghreb, les responsables de la rébellion
Touareg...». Là, on est partagé entre le rire et les larmes. A la fin de la
conversation, on vous apprend que pour des raisons de stratégie, le reste du
plan ne doit pas être déroulé à la place publique. Celle-là est la meilleure.
Tout le monde en abuse y compris les plus « grands opposants » qui
n'accouchent jamais leurs savantes stratégies en public. Et attendant ce
« jour du seigneur », toute autre réflexion doit être bannie. Toute
autre voie énoncée doit être considérée comme une astuce satanique menant à la
collaboration avec la tyrannie des Gnassingbè et Alliés. Mais en agissant
comme on le fait, l'on ne se donne pas tous les moyens pour affronter le mal.
On se coupe de pas mal d'idées et de chemins qui croisant d'autres, pourraient
nous amener à la solution. Et c'est cette façon bouchée, figée de procéder qui
prolonge la vie de cette dictature effroyable. En prétendant la combattre, on
la vivifie et la revigore. Celles et ceux qui enferment notre peuple sur ce
territoire dans ce schéma, sont des idiots utiles de ce régime. Plus ces idiots utiles prennent de la
place, moins le système se préoccupe de son avenir qu'il sait garanti d'office.
Plus, ils utilisent leur arme de prédilection, c'est-à-dire le cri dans le
vide, l'aboiement et les menaces qui ne dépassent guère la rhétorique
illusionniste ces idiots utiles du RPT maintiennent le système colonial en vie
au Togo.
Dans toute entreprise, lorsque vous passez 20 ans ou 30 ans à
ramasser de piteux résultats, il faut questionner vos méthodes et vos moyens.
Or, chez nous c'est interdit. Il faut avancer au même rythme, mieux, il faut
accélérer même si le ravin n'est pas très éloigné de nos pieds. Le bilan
d'étape est interdit. Il faut foncer droit dans le mur et une fois au
pied du mur, on se fait passer pour les Hébreux et on convoque, pour nous
fortifier dans la bêtise, le mythe biblique des murs de Jéricho qui
s'étaient effondrés par la simple volonté divine après le défilé sept fois
autour de la cité pendant sept jours au son des trompettes. Cette naïveté est
suicidaire. Au lieu d'être incessamment imaginatif et plus inventif,
puisqu'étant seuls, on se met à imaginer des alliances. On se met à inventer
des extraterrestres, des deus ex-machina qui viendraient livrer un jour le
combat final pour nous et ravir le pouvoir des mains de ses détenteurs pour
nous le remettre tranquillement. Et ce sera la fin de nos souffrances, la fin
de l'histoire. Qu'elle est belle cette fin! Toutefois, elle n'est que trop
belle pour être vraie. Ce rêve collectif
c'est du pain béni offert sans frais aux apôtres du système RPT.
Certains
disent dans ce contexte qu’il faut donc « redonner la confiance au peuple ».
Certainement qu’il le faut, mais cela ne peut être réalisé que si on l'éloigne
des sentiers du Dieu représenté par cet homme blanc, à la barbe blanche et en
tunique blanche dessiné dans « Réveillez-vous! » des témoins de
Jéhovah. Cette confiance ne peut venir que d'un travail de formation citoyenne,
militante et politique pur jus. Et si les religieux devraient s'en mêler, ils
ne devraient le faire que si et seulement si la politique l'emporte clairement
sur une simple expression de la foi semée en Afrique par le coran et la bible
avec l'appui de l'épée et du fusil. Mais si la foi l'emporte, comme c'est le
cas actuellement, cela signifie que nous ne sommes pas sortis de l'auberge. On
est encore sous les ailes d'un père qui est aux cieux et qui ne nous aura pas
délivré du mal pas plus qu'il ne nous aura fourni le pain quotidien vu le creux
dans nos estomacs dans ce pays. Toute stratégie de regain de confiance
populaire doit sortir notre peuple de toute tutelle : la tutelle de la
Communauté internationale, celle de Dieu, celle des armes qu’on n’a pas, celle
des Proverbes et adages justificateurs de l’impuissance collective, celle de la
désorganisation, celle de l’Eglise, celle des Grands diseurs et petits
faiseurs…C'est d'une prise en main collective dont il est question. Penser par
soi-même, s'organiser par soi-même, tracer les axes du combat par soi-même et
avancer par soi-même avec une intelligence redoutable qui aide à anticiper les
erreurs, les fautes et les difficultés pour les corriger à temps. Voilà ce dont
il est question.
Si Eyadema Gnassingbè nous a
offert en héritage son fils sur le testament rédigé et validé par la France,
c'est qu'il avait étudié méthodiquement la psychologie de notre peuple. La France et Eyadema Gnassingbè savaient la réaction du peuple
africain au Togo. Ils l'avaient donc anticipée et défini la méthode pour la
bloquer. Ils savaient que les émotions et les frustrations s'exprimeront mais
qu'en revanche, rien d'organisé ne sera fait. Et comme attendu, nous avons
répondu à leurs attentes. Nous n'imaginons plus d'autres alternatives. Nous mettons
les sabots à nous-mêmes et il ne reste au système qu'à avancer tranquillement.
C'est ce à quoi nous assistons aujourd'hui.
La dilapidation imbécile des énergies
La politique, c'est comme
les mathématiques. Si vous offrez un ami d'hier à vos adversaires, ils viennent
de gagner un pion de plus et vous, vous en perdez un. Dans le jeu des rapports de force, la conséquence de cette
générosité imbécile c'est qu'un camp tient l'avantage. Pour cela la
dilapidation des énergies à laquelle on assiste à l'heure actuelle est un
immense service rendu au système qui récupère des billes que nous perdons
bêtement. Dans une situation comme la nôtre, si vous ne pouvez pas gardez vos
amis parce que vous estimez qu'ils vous ont trahis, au lieu d'en faire des
ennemis tout emballés et expédiés dans l'autre camp, il faut les neutraliser.
Et là aussi, il existe plusieurs méthodes, seulement il faut y réfléchir.
La question à l'origine, nous semble-t-il, de la scission est
que certains veulent aller au gouvernement alors que d'autres veulent rester en
dehors. Pour nombre de Togolais cette question est insoluble et donc, elle ne
peut trouver de réponse que si on procède à une scission. Il faut qu'il y ait
rupture et que chacun lave publiquement le linge sale partagé en intimité hier.
Il faut qu'on se diabolise mutuellement. Peu importe ce que cela coûte en
dommages. Pour nombre de togolais ce qui
est en jeu c'est le titre de l'opposant absolu, du « vrai » opposant,
celui-là qui sait faire dans les incantations et le discours démagogique de la
stratégie secrète. Et comme n'importe quel titre, il faut le disputer. Il
vaut mieux que rien. Même s'il est sans trophée. Or, pour empêcher une guerre
supplémentaire – puisqu'on n'en a gagné aucune jusqu'à présent– dans le rang
des "démocrates", une autre solution était possible. Mais pour ce
faire, il fallait parler stratégie.
Penser en des termes de stratégies les plus efficaces possibles
En termes de stratégie, on peut laisser ceux-là aller au
gouvernement et les utiliser en notre faveur. On peut non seulement s'en servir
pour conquérir quelques espaces mais aussi comme pions au lieu de les offrir
gracieusement au RPT. Au contraire, on les voue aux gémonies afin qu'ils
aillent rejoindre le pouvoir sous prétexte que là est leur destination
puisqu'on vient de découvrir qu'ils sont des agents doubles de longue date. Ce
qui du coup renforce le système contre nous. Devons-nous simplement rappeler aux idiots utiles du système que dans
les guerres les plus sanglantes, chaque camp infiltre l'autre pour avoir des
informations sur le déplacement de ses troupes, ses stratégies de guerre, son
matériel, ses effectifs et toute chose pouvant aider à développer une
contre-offensive efficace ? La France rompue aux guerres coloniales
qui en livre d'ailleurs une au peuple africain au Togo au travers du RPT, sait
tout ceci. Ainsi infiltre-t-elle toutes les strates de la société pour s'offrir
une base de données extraordinaire sur chaque groupement, amicale, association,
syndicat et parti politique. C'est à ce prix qu'elle sait qui fait quoi, quand,
avec qui et avec quoi. A ce coup là, pas besoin de traitres parmi les
« combattants » pour filer des informations au camp adverse qui sait
ce qu'il fait, ce qu'il veut et s'est tout simplement donné la stratégie qu'il
faut pour gagner. Pendant ce temps, les inventeurs de la stratégie qu'on
n'accouche pas en public dorment et attendent un combat dont ils ignorent tout.
Ils n'ont aucune idée ni des forces en présence, ni du timing des hostilités,
ni sur leurs propres forces et faiblesses.
Pour eux, la seule stratégie -si on peut l'appeler ainsi- viable
et victorieuse consiste à garder toute distance de l'adversaire, à se vanter
plus blanc que neige, à dire « Eh oooh! vous nous voyez, nous avons
toujours dit que seul le fusil est la solution. Donc nous sommes les vrais
opposants. Les autres sont des faux, ils mangent avec le RPT. Ce sont des
traitres. » En somme, tant qu'il
n'y aura pas d'armes à feu, vive le RPT. Et à cette allure, le RPT restera pour
longtemps encore au pouvoir puisque les armes ne tomberont pas du ciel.
Ce qui peut davantage
réconforter le RPT, c'est qu'il sait que l'évocation des armes comme
incontournable solution est un vieux rêve sans cesse renouvelé. Des générations
entières y avaient pensé mais n'avaient pu le réaliser faute d'un vrai travail
d'organisation et de discipline. Toute chose qui n'a pas été corrigée à ce
jour. Au final, si le système au Togo peut avoir de façon définitive une
opposition toute catégorie confondue qui lui oppose rien que le discours de la
révolution armée mythique ou de la prière, eh bien, il pourra même la
promouvoir.
Pendant que le chaos se préparait, nous nous regardions le
nombril
Les raisons qui ont conduit au chaos organisé dans les rangs de
l'UFC étaient visibles et nous en avions parlé à l'époque. Mais personne n'a
daigné écouter. On n'avait pas fini de se regarder le nombril pour lever la
tête et prêter oreille attentive à ce qui s'annonçait. Le fait est qu'un
certain nombre de togolais ont contribué activement à ce mélodrame. Ils avaient
promu M. Fabre à la place de M. Olympio en suivant les autorités françaises qui
leur avaient promis leur soutien en cas de victoire de leur joker. Dans ce
scenario qui va conduire à la guillotine collective, deux capitales ont joué un
rôle de premier ordre. Accra et Paris. Pendant qu'on coupait les herbes sous
les pieds de M. Olympio à Paris en créant le FRAC nargué par la France à la fin
du film, à Accra, Faure Gnassingbè lui-même s'était chargé de convaincre via
les autorités ghanéennes, Olympio à faire autre chose. Tout ceci visait à
confectionner un gilet pare-balle à Faure Gnassingbè. Cette opération
superbement montée connaît une réussite foudroyante et implique deux
considérations.
D'abord, aujourd'hui, pour pouvoir atteindre Faure Gnassingbè,
la cible initiale, il faudrait qu'un camp vainque l'autre avant tout. Entre les
deux branches de l'UFC, l'une doit terrasser l'autre d'abord. Faure Gnassingbè
est hors de portée et il peut souffler- en tout cas pour un moment- car le centre
du combat est déplacé. Le bout du canon n'est plus tourné vers lui. Grâce au
coup de l'intercalaire, on a glissé entre Faure Gnassingbè et le FRAC, un écran
que ce dernier pouvait éviter d'affronter s'il avait été un peu plus
industrieux.
Ensuite, les conséquences du succès de cette opération de démantèlement de
l’UFC ne vont se faire sentir véritablement que lors de futurs vols électoraux
du RPT. Pour expliquer ses « prochaines victoires », Faure Gnassingbè
dira ou fera dire qu'il a réussi là où son feu père a échoué. Il a réussi lui à
casser facilement « l'opposition » ; ce que son père était incapable de faire même à
coup de fusil et de marteau. En conséquence de cette prouesse, le peuple lui
témoigne sa reconnaissance et le gratifie de 65 à 70 sièges à l'Assemblée Nationale
en 2012 et des années supplémentaires à la présidence après 2015.
Mais, il faut aller beaucoup plus loin dans l'analyse. Outre le
système qui ne souhaite plus une UFC forte dans le pays, certaines
personnalités du FRAC n'en voulaient pas non plus. Ces personnalités n'auraient
pas trop pleuré de voir les anciens partis d'opposition s'offrir en ridicule.
C'est comme au temps où la candidature de Yamgname fut rejetée. Beaucoup l'ont
déploré en public mais n'en sont pas moins ravis en coulisses. Ces gens qui
savent qu'une UFC trop forte dans le pays écrase leur avenir politique eu égard
à leur passé mitigé, ont intérêt à pousser à la bagarre interne à l'UFC. C'est
cela la politique: le calcul permanent. En misant sur l'avenir, pousser la
tendance UFC au sein du FRAC à affronter violemment le courant hors FRAC remet
le compteur à zéro. Le terrain redevient vide et eux pourront s'offrir le beau
rôle de nouveaux messies pour les années à venir. A ce niveau le courant UFC au
FRAC aurait dû savoir qu'il perdait plus qu'il gagnait sur le moyen et long
termes. L'unique leçon qu'on peut tirer de cette tragédie est que lorsqu'on n'est pas autonome
intellectuellement, on est influençable. Et plus on est influençable, plus on
est susceptible de prendre des décisions qui vous font haïr vos amis et aimer
vos ennemis. Peut-être devrions-nous passer par cet épisode pour enfin
commencer une véritable théorisation de la lutte.
Si on avait accompli ce travail de théorisation, on aurait pu
savoir gérer au mieux les opinions diverses au sein du mouvement lors de la
prise d'une importante décision. De même, on aurait pu savoir l'attitude à
adopter lorsqu'un membre est arrêté ou savoir à quel moment opéré un changement
de méthodes. Car, il n'est pas un crime
de changer de méthodes. Seuls l'objectif et la cible ne varient guère. Les
méthodes, elles, pour arriver à atteindre l'objectif peuvent subir des
modifications et des adaptations en fonction du temps, de la disponibilité des
ressources et du développement par le camp adverse de nouvelles ou plus
redoutables tactiques.
S'arrêter un moment pour évaluer les possibilités
Nous ne pensons pas que l'on puisse s'engager dans l'action
politique sans s'arrêter à un moment pour analyser les possibilités de succès
ou d'échec. Trop souvent beaucoup se jettent dans la politique de façon
irréfléchie et émotionnelle, alors que la
politique en particulier dans une situation coloniale est une affaire de
sang-froid, de calculs froids et non de coeur. Il s'agit d'éliminer le colonialisme par tous les moyens, nous disons
bien par tous les moyens. Il faut donc que nous formions suffisamment les
nôtres de sorte qu'ils aient une meilleure compréhension de ce qu'ils sont
appelés à faire et comment le faire.
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