Quand l'on ne vit pas l'éloignement ou la perte de la maîtrise de sa terre natale comme un drame absolu; quand, en définitive, l'on se sent bien chez autrui que l'on fait passer dans sa conscience pour chez soi, on ne peut que prendre l'idée de la reconquête pour une simple posture. Voici donc que le noir se dit français, il se déclare suisse. Il se prend en photos dans les rues parisiennes ou new-yorkaises en proclamant qu'il est chez lui. "Chez nous en France", "chez nous en Suisse", "chez nous à Washington", voilà quelques-unes des incantations que le noir s'administre et professe et qui suscite un rire que, par souci d'image et de retenue, l'autochtone évite d'exprimer publiquement.
Il faudra donc retrouver l'esprit de peuple. Car, la première condition pour un peuple de se défendre, de se libérer et de progresser réside dans le sentiment profond qu'il a de son identité d'être, par origine et par destination, un peuple. C'est d'abord la conscience de cette appartenance qui forge les outils matériels, techniques et organisationnels nécessaires à la lutte pour la vie collective d'une masse. C'est c'est esprit qui permet aux peuples de se battre pour reconquérir leur espace occupé. Les Noirs étant isolés les uns des autres, dispersés aussi bien sur le sol africain que dans les îles et autres terres de déportation ont perdu ce sentiment de peuple. N'ayant plus la notion de peuple, et ne désirant que trop peu la retrouver, il est tout à fait normal de voir la place qu'occupe le peuple noir dans cette vallée humaine. Particulièrement, peu de nos enfants déportés entendent avoir encore quelque chose avec leur lieu d'origine d'où ils furent enlevés et déportés par les négriers et vraiment trop peu sont disposés à entendre l'appel du retour à la maison. Démontrant ainsi que notre peuple est disposé à faire sien et à accepter se coucher là où "l'homme blanc" et autres puissances en action lui indiquent ou le propulsent au gré de leurs intérêts.
Les africains doivent savoir qu’une des lois de l’histoire est que ce sont les vainqueurs qui dictent les règles du jeu. Il ne s’agit pas de morale ou de sentiments. Les hommes qui animent les institutions coloniales ne perdent pas leur temps avec ce genre de notions. Les peuples et leurs dirigeants déchus se font diriger par les pires bouffons et trouvent leur vision des choses complètement altérée. C’est ainsi. Il ne s’agit ni de parole de Dieu que des africains aiment tant, ni de proverbes africains justificateurs de notre état. Malheur donc aux peuples vaincus et qui, dans la défaite, refusent d'en diagnostiquer les raisons pour espérer se redresser. Car, aussi longtemps qu'ils seront des vaincus, ces peuples sont destinés à payer la rançon de la défaite aux vainqueurs aussi criminels soient-ils.
Komla KPOGLI
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