samedi 15 novembre 2008

MISE AU POINT DE RODRIGUE KPOGLI


A PROPOS DES REACTIONS SUR LE TEXTE : RETOUR DES BREBIS PERDUES ?

15 novembre 2008
Rodrigue KPOGLI
http://lajuda.blogspot.com

En date du 07 novembre 2008, nous avons signé un texte : Togo : le retour des brebis perdues ? Ce texte suscite plusieurs réactions auxquelles, nous apportons des précisions suivantes :

1. Retours : bonne ou mauvaise chose.

La question ne se pose pas en ces termes. Nous disons que tous les Togolais ont le droit de sortir et de revenir. C’est un droit inattaquable. Mais là où se trouve le problème, c’est annoncer urbi et orbi, sa rentrée au Togo. C’est une belle publicité gratuite pour un pouvoir qui demeure antidémocratique, tyrannique et qui amasse ces coups de publicités pour justifier d’éventuelles tricheries électorales. D’ailleurs, Republicoftogo.com dans un article intitulé « Retour d’Exil », publié le 10 novembre 2008, s’est exclamé triomphalement en des termes suivants : « La politique de réconciliation prônée par le président Faure Gnassingbé porte ses fruits. De nombreux opposants exilés en Europe et en Afrique sont revenus au pays ces derniers mois. Dernier en date à annoncer son retour, Jean Yaovi Dégli… »

2. Déclencher une « polémique malsaine ».

Le texte n’a pas pour objet de susciter une polémique malsaine. Encore une fois, nous nous sommes épanchés sur la stratégie utilisée pour rentrer au Togo et non sur le choix des uns et des autres que nous respectons, absolument. Notre intérêt s’est plutôt porté sur les retours annoncés avec fracas qui, à contrecoup, rendent service au pouvoir en place.

3. Rentrer au Togo pour quels objectifs ?

Pour raison familiale (privé) ou pour raison politique (publique), tout Togolais à l’étranger, a le droit de retourner au Togo. Il faut, pour éviter la confusion, préciser l’une ou l’autre dans les annonces que l’on fait. Mais faire passer sa rentrée sous le manteau politique et la présenter sur des médias comme un acte courageux de lutte patriotique puis déclarer plus tard qu’on est allé voir sa mère malade, soutenir son oncle alité, visiter la tombe de sa cousine, assister à une messe, visiter sa communauté villageoise en fête, assister aux funérailles d’un de ses parents,… est discutable. Pardon ! Mais ces actes, aussi sympathiques et touchants soient-ils, ne sont pas d’ordre public. Ils n’intéressent pas tout le monde.

4. Un retour au bercail avec une stratégie politique concertée.

C’est une bonne chose pour la lutte démocratique au Togo si des Togolais exilés depuis des années, retournent sur le terrain avec à l’idée de se mettre en rapport avec des structures politiques et citoyennes qui y œuvrent encore. Mais ceci serait encore plus rentable si ces retours sont concertés, discutés avec d’autres personnes ou organisations au sein de la diaspora. Avec une telle méthode, ces retours au Togo sont mieux organisés. Ils ne seraient donc pas qu’une initiative privée, personnelle annoncée sur des médias, ouvrant la voie à toutes les spéculations possibles.

5. L’implication de la diaspora dans le combat pour les droits au Togo.

La J.U.D.A est l’une des rares organisations citoyennes à revendiquer publiquement et à plusieurs reprises, une place pour la diaspora dans toutes les initiatives politiques. Cet acharnement a poussé des voix -notamment dans une émission sur Radio Nostalgie à Lomé, sur les discussions à Ouagadougou, le représentant de la jeunesse du CAR- à traiter la J.U.D.A d’une organisation « mandatée pour la diaspora » ou « porte-parole de la diaspora ».

6. Hier critiquant les Togolais d’être restés à l’extérieur, aujourd’hui critiquant ceux qui retournent au Togo.

Des esprits allumés ont cru pouvoir nous blesser en relevant des contradictions dans nos démarches. Contrairement à ce qu’ils croient, nous n’avions jamais reproché aux compatriotes de la diaspora de rester à l’extérieur. Nous avions plutôt souvent affirmé qu’ils ne doivent voir leur éloignement géographique comme une bouée de sauvetage. Au contraire, nous leur demandons de s’engager de là où ils sont, à travers des organisations effectivement présentes sur le terrain. Pour preuve, voici ce que nous disions dans notre communication du 08 juin 2006 lors de la conférence publique à Lomé sur le thème : quelle jeunesse pour le Togo ?[1]

« Chers frères et sœurs,

Quel doit être le rôle de la diaspora dans le combat du peuple togolais ? Nous préférons à la diaspora, le terme les Togolais de l’étranger convaincus des idéaux démocratiques car la notion de diaspora est plus large. Et nous savons qu’au sein de cette diaspora, il y a une forme de mafia qui se développe ; des gens qui sont entre deux avions matin, midi, soir et qui émargent à des milliers d’euro ou de dollars pour des services clandestins. Toutes ces informations, nous les connaissons. Donc, nous devons en interne comprendre qu’une partie de cette diaspora là, est inféodée au pouvoir mais parfois joue à la plus engagée en faveur de la lutte démocratique.

Ces Togolais de l’étranger attachés aux valeurs démocratiques doivent sortir de la nervosité idéologique caractérisée par le djihad verbal pour travailler à un schéma stratégique pour libérer le Togo. Ils doivent se constituer en une sorte de diaspora juive qui, par mouvement retour, apportera sa force à la libération du Togo. Ces Togolais de l’étranger doivent comprendre que la gouvernance par Internet (l’E-gouvernance) qui consiste à lancer des appels via l’Internet alors qu’aucun relais n’est sur le terrain, ne sert pas véritablement. Ils doivent être sur le terrain, en pleine en action à travers des structures effectivement engagées. Les liens de fraternités et de familiarité qui ont été jusqu’ici les canaux habituels par lesquels ces camarades opèrent, doivent cesser d’avoir droit de cité pour faire place à des alliances stratégiques objectives et intelligentes. »

A Paris, le 29 décembre 2007, lors de la journée citoyenne du MDTE, nous disions dans notre communication : quel fil rouge maintenant après les législatives, que pour remobiliser le peuple togolais, il faut entre autre « qu’on ait une diaspora organisée, engagée et qui fait du lobbying et fournit dans la mesure du possible de la logistique aux personnes et structures sur le terrain. Merci à ceux qui d’ici s’engagent pour le développement du Togo mais nous souhaitons souligner avec force qu’envoyer ou rentrer au pays avec des livres des Occidentaux ne contribue en rien à l’éclosion mentale de la jeunesse. Au contraire, on l’abrutit. Il vaut mille fois mieux envoyer au Togo un seul livre de Cheikh Anta Diop que d’y déverser des tonnes de livres qui nous enseignent à longueur de journée « Abalo et Afi vont à l’école ».[2]

7. Directeur de conscience ou juge. Diabolisation ou étiquette de traitres.

Le texte « Retour des brebis perdues ? » n’a pour ambition ni de juger ni de diriger la conscience de qui que ce soit. Au contraire, estimant que chacun est libre dans ses jugements, le texte a volontairement passé sous silence les motifs des « rentrants ». Le texte n’a ni diabolisé ni étiqueté qui que ce soit. Nous analysons tout simplement les conséquences politiques possibles de la médiatisation de ces retours.

8. Prison de la pensée unique

Grossière caricature ! La pensée unique, c’est justement demander à tout le monde d’applaudir ces retours qui, par leur déroulement, mélangent motif familial ou personnel et intérêt politique commun tout en utilisant astucieusement le second pour servir le premier.

9. Exil à vie ?

Aucun Etre humain intelligent ne peut souhaiter ni personnellement vivre en exil à vie ni le désirer pour ses compatriotes. Le problème n’est pas de connaître les partisans de l’exil permanent et de ceux qui sont contre. La question est de savoir éviter de prêter mains fortes- inconsciemment -au pouvoir tyrannique en place au Togo et de comment procéder pour rentabiliser au mieux les retours au bercail. Qui peut être heureux de quitter sa famille, ses amis, sa terre natale au point de vouloir perpétuer sa vie à l’étranger ? Ce manichéisme est le témoignage d’une mauvaise foi patente. Car, même les Noirs qui se sont retrouvés aux Amériques par la déportation esclavagiste, ne cessent de se frayer la voie du retour à leurs racines.

10.Toucher du doigt les enjeux, les carences et les améliorations à apporter.

C’est exactement ce à quoi s’est attelé notre texte. Réfléchir profondément sur les enjeux des publicités autour des rentrées. Quelles sont les carences de cette stratégie de communication et quelles peuvent en être les conséquences ? Retour solitaire ou concerté : lequel des deux est plus rentables ? Mieux organisé tout ceci avec l’appui des uns et des autres qui peuvent, soit contribuer en nature ou en idées, soit en fournissant des adresses au « rentrant. A moins d’avoir un agenda et des objectifs personnels (qui bien évidemment sont des droits mais qui méritent d’être clarifiés) qui n’ont tout de même rien à avoir avec le souci populaire de libérer le Togo de la tyrannie.

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