vendredi 27 mai 2011

Libye: Obama, le prix Nobel de la paix « des guerres justes et humanitaires ».

A l'avènement de Barack Obama au pouvoir, des milliards de personnes sur la terre avaient manifesté leur optimisme. Parmi celles-ci, c'est peu dire qu'il y a eu la quasi-totalité des africains. Tous étaient persuadés que la couleur de peau du nouveau président augurait un changement de la politique internationale. Il faut en convenir et insister qu'ils n'étaient pas les seuls. Les quelques rares voix qui avaient émis des réserves furent sévèrement critiquées et taxées d'antiaméricanisme primaire ; expression en vogue à l'époque.

Le sourire du guerrier sympathique.

Lorsque le futur prix Nobel de la paix fit son périple ghanéen, il fut applaudi chaleureusement. Son discours fut quasi-unanimement salué particulièrement par les africains qui ne virent là qu'un excellent discours à l'opposé de celui injurieux et crasse de Sarkozy à Dakar. Les rares commentaires critiques qui osèrent mettre l'allocution d'Accra en perspective furent voués aux gémonies1. Ils furent traités de conservateurs haineux qui n'avaient pas vu le vent du changement soufflé.

Aujourd'hui, avec le recul, peut-être qu'en Afrique tout au moins, les plus enthousiastes d'hier commencent par comprendre deux ou trois choses. Le sourire et l'image du « Mister President » et de sa famille étaient certes rafraîchissants pour un monde mis à feu et à sang par G.W Bush et ses lieutenants ; ces criminels de guerre qui, librement, vivent dans leurs ranchs, font du jardinage, écrivent leur mémoire et engrangent des droits d'auteur, boivent du petit lait, animent des conférences un peu partout et offrent leurs conseils pour d'autres guerres en cours ou à venir. Leur impunité est garantie d'office car, ils appartiennent au monde occidental excessivement ivre de force et détenteur des clés de la cour pénale dite internationale du bidonnant Moreno Ocampo, si prompt à harponner des fretins. Mais on a trop vite fait d'oublier que la politique reste ce qu'elle est et que l'Oncle « Barry » Obama, n'allait pas troquer sa belle image mondialement acceptée contre les intérêts des Etats-Unis d'Amérique. On ne mange pas l'image. Cela peut servir, oui. Mais, cela seul n'ouvre pas des marchés aux entreprises, pas plus qu'elle n'apporte des points de croissance à l'économie. Si le monde économico-financier a misé sur ce cheval noir, c'est pour que son sourire et sa belle image servent à quelque chose. Il doit gagner des courses. Le pragmatisme, pour utiliser un terme bien connu, doit être de son apanage. ...Passons !

Chose curieuse, alors même qu'il était sur deux fronts de guerre ouverte : Irak, avec un retrait qui n'en est pas un et Afghanistan, un prix Nobel2 lui a été décerné. Son pays n'avait de cesse de provoquer en toute finesse des pays comme l'Iran, la Corée du Nord, le Cuba et le Venezuela. Oncle Barry a tenté de hausser le ton devant Israël et ses incessants massacres en Palestine. Sommé d'abandonner son antisémitisme3 - puisque toute critique à l'égard de cet Etat est identifiée à ce mal terrifiant - il a été vite et sévèrement redressé et ainsi a-t-il laissé la main libre à la colonisation et à la répression. A chaque fois qu'un téméraire avance au sein de la boîte à outils occidentale qu'est l'ONU et surtout son Conseil de sécurité un texte visant à contraindre Israël à faire un geste si minime soit-il dans ce qui est ironiquement appelé « les territoires », l'Oncle Barry via sa Susan Rice – car Bush n'était pas le seul à avoir une Rice de même couleur – dégaine son véto. Et pourtant cette Rice là, c'est elle qui a failli lever les deux mains en faveur du texte de Sarkozy présenté par l'ex-délinquant qui avait « trahi la confiance du peuple français »4Alain Juppé pour agresser la Libye5. Tellement la Rice était comblée6.

Sans en donner l'air, le prix de Nobel de la paix fait des guerres. Mais, ces guerres là elles sont – ne souriez pas - « justes et humanitaires ». Elles sont nécessaires et utiles pour l'humanité. Exactement comme celles menées par Bush et ses « freedom fighters » au motif de libérer la planète de « l'Axe du mal ». La seule différence c'est que le prix Nobel de la paix 2009 évite autant que possible de rentrer en treillis et de revêtir les attributs ainsi que le ton martial d'un chef de guerre. Redoutable communicateur, Obama agit autrement que son prédécesseur. Il sait ne pas y aller seul. Il sait éviter d'apparaître en première ligne. Cette stratégie de mener la guerre sans se faire trop voir, est tellement visible sur la Libye. Dans cette agression, il a su s'effacer pour mener la bataille via des sous-lieutenants qui n'ont rien à envier à Tony Blair. Ces sous-lieutenants à savoir les zélés Sarkozy et Cameron sont aux avant-postes. Ils sont pour la cause, accompagnés de leurs frères d'armes du Canada, d'Italie, de Pologne, du Danemark, d'Espagne, de Belgique, du Portugal et bien d'autres, pour la plupart rompus depuis des millénaires à une culture de guerres coloniales, d'agression et de rapines à travers le monde. Ces pays, en meute si possible, en loup solitaire si besoin, agressent les pays qui ont le malheur d'être pourvus par dame nature de matières premières convoitées, enflamment la terre, tuent des populations civiles, soumettent des peuples affaiblis, saignent aux quatre veines des territoires à l'issue des opérations de braquage à mains armées cyniquement qualifiées d'opérations « humanitaires ». Quasiment tous les pays arabes, africains et latino-américains ont goûté ou goûte régulièrement à ce plat « humanitaire ». Lequel a déjà empoisonné et englouti des civilisations entières.

Faisons la guerre tout en gardant la "cool attitude.
Que d'excuses et de circonstances atténuantes pour ce nouveau chef de guerre ! Obama ne fait pas la guerre, dit-on. Ah oui ?? « Il a rencontré des guerres qui étaient créées avant son avènement ». « Il ne peut pas les éteindre ». « Il est obligé de les gérer ». « Il fait des guerres justes ». « Ce sont des guerres qui s'imposent à lui, il n'y peut rien ». La vérité face à toutes à ces argumentations sophistiquées, est que le prix Nobel de la paix fait des guerres. Il les fait en souriant, renvoyant ainsi à une opinion tétanisée la belle image qui est la sienne. Or, la guerre dans le concret, est ignoble et horrible. Obama lui les mène les mots d'une douceur à faire dormir debout, à la bouche. C'est là son génie.

Aujourd'hui, c'est la Libye qui est prise. Elle est étranglée par la meute. Elle est bombardée sous le fallacieux prétexte que son dirigeant, Muammar Kadhafi « massacre des populations civiles » qui manifestent pacifiquement. Curieuse présentation des faits qui pourtant montrent des rebelles lourdement armés s'emparant des villes7 et confisquant des ressources8. Face à ces faits, le prix Nobel de la paix des « guerres humanitaires » et ses amis demandent au pouvoir libyen de ne pas réagir, de laisser les rebelles avancer jusqu'à prendre la capitale du pays et mettre à la place du khalife, un nouveau khalife plus docile. On demande au pouvoir libyen de ne pas riposter et d'assister les bras croisés au déchirement de son territoire. On lui intime l'ordre de cessez-le-feu et de laisser le passage aux rebelles. On voit des scènes de guerre et on demande à une seule partie de désarmer. Or pendant la guerre, il est évident que chaque camp tue. Mais, lorsqu'à deux reprises, Kadhafi proclame un cessez-le-feu, s'est-on demandé au moins ce que les « insurgés » font pendant ce temps ? On se contente juste de nous dire qu'il décrète le cessez-le-feu pour mieux le violer9. La conclusion serait donc de l'attaquer.

Visiblement, ces « insurgés » ont d'importantes missions à accomplir. C'est pour cela que leur protection est si prompte. Non seulement, ils feront des gouvernants plus dociles qui offrent déjà et offriront encore du pétrole et du gaz quasi-gratuitement, mais aussi ils sont appelés à éloigner des côtes européennes, les immigrés retenus en Libye. Comme pour livrer au lynchage ces immigrés africains stockés en Libye par Kadhafi sur recommandation des Européens, et les éloigner davantage des frontières de l'Europe, on a répété sans coup férir que Kadhafi avaient importé des mercenaires des pays subsahariens. Ce refrain propagé par les médias propagandistes pro-guerre, à l'analyse, avait visiblement pour but de faire massacrer par les rebelles10 une partie de ces africains et par ricochet, semer la terreur parmi ces migrants parqués par Kadhafi dont la chute pourrait entraîner une arrivée massive sur le sol européen. Délibérément la vie de ces africains a été sacrifiée sur l'autel d'une politique migratoire. Ces actes là sont des crimes. De ces crimes là, on n'en parle pas. Ou si on en parle c'est pour les justifier en présentant les personnes tuées comme des mercenaires. Le prix Nobel de la paix s'est-il prononcé sur ces exactions sur les africains ? Où est Moreno Ocampo ?

Et comme c'est toujours le cas, le modus operandi n'a guère varié. On couvre les crimes des amis, on révèle voire fabrique ceux de l'ennemi à abattre. On passe par les instruments de l'éternelle boîte à outils occidentale : l'ONU et le fameux Conseil de sécurité dominé par les cousins occidentaux, si ce n'est pas elle, on sollicite l'OTAN, on parle de coalitions par-ci et d'alliance par là. Si ces instruments de légitimation de l'agression ne suffisent pas, on fait appel à des ensembles régionaux tels l'Union Européenne, l'Union Africaine, la Ligue Arabe et quoi encore ? Les médias, eux, n'ont jamais accompli leur meilleur rôle qu'en ces moments de guerre. Pendant que les « frappes chirurgicales » terrorisent les populations sur le terrain des opérations, ils font de la césarienne à l'information dans les salles de rédaction, propagent les pires mensonges, suppriment des images et convoquent sans discontinuité des experts autoproclamés, nourris à la mamelle du complexe militaro-industriel et des milieux du business de la guerre pour asséner leur évangile à tous ceux qui veulent les écouter. Le cas typique est celui de cet avion abattu au-dessus de Benghazi, présenté dans un premier temps unanimement comme celui de Kadhafi et comme la preuve de la violation11 du cessez-le-feu déclaré la veille. Plus tard, les rebelles avaient fait savoir que cet avion était le leur12. Réaction : une ou deux phrases ici et là. Résultat : un peu passé inaperçu... Passons !

Le prix Nobel de la paix est donc un fauteur de guerre au même titre que son prédécesseur. La seule divergence entre eux est que le premier joue plus finement. Il avait eu la même attitude sur la Côte d'Ivoire jusqu'au jour où Sarkozy, toujours plus zélé et souvent plus royaliste plus que le roi a gaffé avec l'ultimatum lancé contre Gbagbo depuis Bruxelles13. Ce qui a eu le « malheureux » mérite de réveiller beaucoup d'africains qui dormaient encore. Sarkozy aurait eu l'intelligence d'inverser les rôles et laisser aux avant-postes l'Oncle Barry qu'une « opération humanitaire » serait déjà réalisée dans ce pays qui au demeurant, sera le prochain sur la liste après la Libye. Il suffit d'écouter l'ex-délinquant français Alain Juppé14 qui utilise la même rhétorique que sur la Libye en appelant l'ONU, toujours elle, à " jouer son rôle plus efficacement", avant de rappeler que "son mandat permet d'utiliser la force" contre les "crimes contre l'humanité commis par Laurent Gbagbo". Là encore, on ferme les yeux sur les exactions des rebelles et du « commando invisible »15 du couple Ouattara-Soro. Ce sont des amis.

Alors, une prochaine résolution issue de la case du sorcier nommée Conseil de sécurité de l'ONU contre la Côte d'Ivoire avec la même meute, et Obama en « cool attitude », sourire aux lèvres fera cette nouvelle "guerre humanitaire" à laquelle le destin l'aura obligée. 

Salut l'artiste !


21 mars 2011
Komla Kpogli
Web. http://lajuda.blogspot.com

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