19 mars 2009
Rodrigue KPOGLI
Web. http://lajuda.blogspot.com
Pour nous Togolais, écrasés par une tyrannie quinquagénaire rajeunie en 2005 dans un rituel sanglant, toute situation politique dans laquelle des corps de l’armée rejoignent ce qui est coutumièrement appelé l’opposition est un signe de changement démocratique. Cette façon quasi-automatique de percevoir les choses est malsaine et tronquée.
Ce qui se passe actuellement à Madagascar- il faut le clamer- n’est pas fondamentalement dans le sens du progrès de la culture démocratique. Car, même si le président déchu Ravalomanana n’est pas un ange, il y a des éléments à clarifier dans le fond de l’affaire (ce qui sera l’objet d’un article en préparation).
Pour un peuple comme celui du Togo désirant sortir des griffes d’une des dictatures les plus obscures au monde, qu’il y ait des leçons à retenir du cas malgache, c’est certain. Mais, applaudir voire recommander ce changement pour le moins sombre dans le fond et visiblement téléguidé n’est pas un exercice lucide.
A cet effet nous nous livrons à la tâche de relever quelques leçons pouvant être apprises par les Togolais. :
1- Les arguments utilisés contre le pouvoir de Marc Ravalomanana.
Outre les reproches classiques adressés aux dirigeants africains, le président malgache est culpabilisé d’avoir acheté un avion Boeing 737-700 à Walt Disney Louisianne (USA) à 60 millions de dollar alors même que la majorité des malgaches arrivait péniblement à s’assurer deux repas quotidiennement. Contrairement à Madagascar où ce luxe paradoxal est utilisé politiquement, au Togo, Eyadéma Gnassingbè qui avait acquis un avion du Sultan de Brunei alors même son peuple tirait le diable par la queue, a voyagé tranquillement à bord de son vieux coucou jusqu’à ce qu’il ne prenne feu à Niamey. Aujourd’hui c’est dans un silence assourdissant que ses enfants, ayant grandi dans le luxe sur le dos des Togolais, continuent cette folie des grandeurs en s’octroyant 3 Rolls-Royce à hauteur de 900.000 dollar US pour Kpatcha et une Maybach coûtant 1,2 millons d’Euros pour Faure Gnassingbé.
Pendant que la question de la vie chère a été récupérée à Madagascar par Andry Rajoelina, alias TGV, au Togo les prix des denrées alimentaires et de premières nécessités ont monté vertigineusement dans une relative indifférence. Le maïs avait franchi des seuils jamais égalés, les carburants avaient flambé alors même que les salaires stagnaient et le porte-monnaie des Togolais était vide. Nous, au Togo, en bons spécialistes de la débrouillardise, nous avons fait avec. Rares sont pourtant les peuples qui peuvent se garder de toute réaction face à de pareils mépris.
Rodrigue KPOGLI
Web. http://lajuda.blogspot.com
Pour nous Togolais, écrasés par une tyrannie quinquagénaire rajeunie en 2005 dans un rituel sanglant, toute situation politique dans laquelle des corps de l’armée rejoignent ce qui est coutumièrement appelé l’opposition est un signe de changement démocratique. Cette façon quasi-automatique de percevoir les choses est malsaine et tronquée.
Ce qui se passe actuellement à Madagascar- il faut le clamer- n’est pas fondamentalement dans le sens du progrès de la culture démocratique. Car, même si le président déchu Ravalomanana n’est pas un ange, il y a des éléments à clarifier dans le fond de l’affaire (ce qui sera l’objet d’un article en préparation).
Pour un peuple comme celui du Togo désirant sortir des griffes d’une des dictatures les plus obscures au monde, qu’il y ait des leçons à retenir du cas malgache, c’est certain. Mais, applaudir voire recommander ce changement pour le moins sombre dans le fond et visiblement téléguidé n’est pas un exercice lucide.
A cet effet nous nous livrons à la tâche de relever quelques leçons pouvant être apprises par les Togolais. :
1- Les arguments utilisés contre le pouvoir de Marc Ravalomanana.
Outre les reproches classiques adressés aux dirigeants africains, le président malgache est culpabilisé d’avoir acheté un avion Boeing 737-700 à Walt Disney Louisianne (USA) à 60 millions de dollar alors même que la majorité des malgaches arrivait péniblement à s’assurer deux repas quotidiennement. Contrairement à Madagascar où ce luxe paradoxal est utilisé politiquement, au Togo, Eyadéma Gnassingbè qui avait acquis un avion du Sultan de Brunei alors même son peuple tirait le diable par la queue, a voyagé tranquillement à bord de son vieux coucou jusqu’à ce qu’il ne prenne feu à Niamey. Aujourd’hui c’est dans un silence assourdissant que ses enfants, ayant grandi dans le luxe sur le dos des Togolais, continuent cette folie des grandeurs en s’octroyant 3 Rolls-Royce à hauteur de 900.000 dollar US pour Kpatcha et une Maybach coûtant 1,2 millons d’Euros pour Faure Gnassingbé.
Pendant que la question de la vie chère a été récupérée à Madagascar par Andry Rajoelina, alias TGV, au Togo les prix des denrées alimentaires et de premières nécessités ont monté vertigineusement dans une relative indifférence. Le maïs avait franchi des seuils jamais égalés, les carburants avaient flambé alors même que les salaires stagnaient et le porte-monnaie des Togolais était vide. Nous, au Togo, en bons spécialistes de la débrouillardise, nous avons fait avec. Rares sont pourtant les peuples qui peuvent se garder de toute réaction face à de pareils mépris.
Un troisième reproche qui est fait à Ravalomanana était la cession de quelques 1.300.000 ha, la moitié des terres cultivables du pays à une entreprise privée, le sud-coréen Daewoo, pour la culture de maïs transgénique destinée à la population coréenne. Au Togo, le pouvoir a cédé une partie de la plage de Lomé à un certain Christian Dervieux qui est en train de la transformer complètement en un complexe hôtelier qui sera inaccessible aux togolais moyens. Une minutieuse enquête révèlerait certainement d’autres terres vendues ou cédées aux multinationales et aux soi-disant investisseurs étrangers. La question de la terre est sensible partout. Cependant au Togo, rare sont ceux qui se sont émus à propos de cette affaire. Les politiques quant à eux, ont d’autres chats à fouetter.
Comme on peut le voir à travers ces trois arguments, le Madagascar n’est pas le Togo et les Togolais ne sont pas les Malgaches. Il y a donc à apprendre chez ces derniers la façon dont les questions de divergence sont travaillées.
2- Le comportement de l’armée.
C’est le point sur lequel certains observateurs togolais insistent le plus. Des éléments de l’armée malgache ont tiré sur les foules dans un premier temps, puis se sont abstenus. Plus tard, l’armée dans presque sa totalité à la différence de quelques hauts gradés, a rejoint les manifestants. « Nous ne sommes pas là pour tuer nos compatriotes » ont-ils d’ailleurs clamé. Au Togo, l’armée n’a pas cet esprit. Elle est jusqu’au-boutiste et animée d’une volonté manifeste de montrer ses muscles aux civils.
Sur le plan purement formel, le comportement de l’armée malgache doit servir de leçon aux forces armées togolaises.
3- l’endurance et la détermination des manifestants malgré les écueils.
On a pu noter à Madagascar que malgré la répression, les masses n’ont pas renoncé. Et les manifestants ont continué leur mouvement dès lors qu’ils estimaient que la cause était juste et digne d’être portée.
En tant que peuple en lutte, les Togolais doivent retenir cette leçon importante de détermination et de ténacité.
4- le rassemblement autour d’une cible.
Encore une fois, dans la forme des choses, il y a regroupement à Madagascar autour d’une cible : le pouvoir en place. Des individus et organisations les plus hétéroclites se sont réunis pour agir contre leur cible. Et ce regroupement conscient des enjeux qui sont les siens, n’a pas perdu du temps ni dans des querelles interpersonnelles de bas étages ni dans des considérations individuelles. Il avait aussi conscience de ses objectifs et donc, avait tu les divergences face à l’adversaire du moment.
Au Togo, c’est difficile de réussir une œuvre pareille. Tant les détestations et les inimitiés sont patentes. Lorsque le cynisme, la duplicité, l’hypocrisie et les calculs personnellement mesquins gagnent les rangs de ceux qui prétendent affronter le pouvoir en place, il n’y a pas de rassemblement possible des forces. Au contraire, c’est la stratégie de peau de banane et de division qui l’emporte pour le plus grand bien de la cible.
A ce niveau également, nous Togolais avons à apprendre de ce qui se passe à Madagascar.
5- l’utilisation efficiente des médias.
A Madagascar, le mouvement d’Andry Rajoelina a fait propager dans le pays, des informations voire des intoxications via les médias. Le camp adverse a beau jeu d’apporter le démenti sur l’affaire Daewoo et sur la démission de Ravalomanana le 17 mars dernier… C’était trop tard. La bataille de la communication a été gagnée d’avance par le TGV et ses partisans. C’est une leçon à retenir. La réalité au Togo est que les partisans de la démocratie ont toujours relégué la question de la possession des médias au second plan.
Nous n’avons cessé de le clamer : les médias sont un outil important pour l’aboutissement d’une lutte. Ne pas en avoir, c’est se priver d’une arme essentielle.
6- le leadership de la contestation.
Il est à rappeler que l’objet de ce texte est de montrer quelques leçons à retenir du cas malgache sur le plan purement formel mieux, organisationnel.
La plus importante leçon -à notre avis- est le leadership de la contestation malgache. Sans entrer dans le fond du sujet, voilà un jeune de 34 ans, DJ de night Clubs, sans autres expériences politiques que la mairie de Tananarivo remportée depuis seulement le 12 décembre 2007 avec 63, 32% des voix des 40% des électeurs. Cet homme est le créateur de l’imprimerie numérique Injet et propriétaire d’une chaîne de télévision et de radio Viva. Mais, il sait aussi parler aux foules en transcrivant leurs préoccupations en discours politique. On lui a fait un minimum de confiance malgré ses faiblesses. Son coup a donc été gagnant.
Alors qu’à Madagascar, ce jeune qui n’est certainement pas le meilleur est porté, au Togo, on pense et on sérine que le devant de la scène doit être réservé à la caste d’opposants constituée de vieux loups et caïmans bardés de diplômes pourtant notoirement affaiblis. Personne autre que ces vieux leaders professionnels ne peut prendre des initiatives sans être systématiquement exposé au dénigrement, à la calomnie, aux tentatives tutélaires souvent réussies à travers des opérations de récupérations et in fine aux blocages de toute sorte. Une idée qui ne porte pas le cachet des partis traditionnels est vouée à l’échec, puisqu’il lui manquerait la bénédiction d’une population devenue finalement, à force de miser sur un hypothétique homme providentiel au détriment d’une organisation collective, l’otage à la fois du pouvoir et de l’opposition.
Au Togo, nous avons érigé des mythes et des dieux de la politique dont il nous est presque impossible de nous débarrasser aujourd’hui. Quand on se fait des dieux, forcément on les adore. Quelle que faute qu’ils aient commis, ces dieux sont irremplaçables. N’ayant plus le statut humain, ces acteurs politiques au sens théâtral du terme sont devenus des arêtes qui nous sont restées en travers de la gorge.
Les Malgaches viennent de nous faire la leçon que le meilleur leader n’est pas obligatoirement celui que l’on attend et que celui-ci n’est pas nécessairement où il est attendu. Allons-nous en tant que peuple en lutte méditer toutes ces leçons de forme, ou allons-nous continuer à vanter une certaine expérience au détriment du dynamisme, de la constance et d’une véritable stratégie de conquête du pouvoir ?
2 commentaires:
Bonjour,
J'ai failli ne pas lire votre article car j'ai trouvé détestable la photo l'illustrant étant entendu que les contre-exemples de "cette crise malgache" y sont à foison. Mais étudiant-journaliste, j'ai osé le lire. Au finish, autant il est bien de faire une parallèle avec le cas togolais, autant il ne faut pas trop en dire au risque d'oublier l'objectif du papier. jey_mb2001@yahoo.fr
Vous n'avez en effet pas l'air d'avoir compris l'objectif du papier!
Petit donneur de leçon deviendra grand...!
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