La francophonie est en panne. L’Organisation internationale de la Francophonie passe pour une structure dédiée aux stratégies d’influence de Paris, surtout en direction de l’Afrique. L'heure est au bilan pour l'organisation chargée de la promotion de la francophonie.
A l'occasion du 400e anniversaire de sa fondation, la ville de Québec accueillera en octobre le XIIe Sommet des chefs d’Etat francophones.
Vingt ans après le premier sommet qui s’est tenu à l’initiative du Président François Mitterrand, à Versailles, en 1986, la définition de la place occupée par la francophonie sera une nouvelle fois posée.
Avec deux questions cruciales : la politique étrangère peut-elle encore utiliser la francophonie comme outil de la diplomatie ? Et la francophonie peut-elle perdurer en dehors de la diplomatie française ?
C’est un défaut caractéristique des pouvoirs publics français que de tenter de résoudre un problème en créant une institution.
Puisqu’elle existe, on croit que la difficulté est surmontée, et voici qu’on s’engage dans des manœuvres politiques compliquées pour que vive l’institution et bientôt pour la justifier afin qu’elle survive.
Le cas de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) est caractéristique : inventée par le Président François Mitterrand pour organiser la coopération avec les économies pauvres de l’ère francophones, et pour mobiliser dans ce sens les économies francophones riches, elle a été pervertie au point de devenir une structure de médiation politique dirigée par la France, au profit de la France.
Selon le général Emmanuel Beth, directeur de la coopération militaire et défense au ministère des Affaires Etrangères : "Le thème Paix et sécurité tend à prédominer dans les objectifs des institutions francophones : la prévention des conflits précède désormais la gestion de la coopération. L’Organisation internationale de la francophonie joue un rôle accru depuis le développement de la multilatéralisation au cœur de laquelle se trouve la question de la paix et de la sécurité (…) La francophonie apparaît comme un vecteur de retour à l’Etat de droit."
La transformation de l'OIF remonte à la Charte de Hanoï de 1997.
A cette époque, sous l’impulsion de son Secrétaire général, l’Egyptien Boutros Boutros Gali, l’organisation évolue, passant d'une organisation para étatique dont la France était le cœur, à une nouvelle francophonie détachée de la France. On sort, en théorie, d’une organisation dominée par le principe de l’Etat national.
Mais cette identité internationale n'empêche pas le retour des vieux démons.
Bien vite un glissement apparaît. Pour imposer l’utilité de son existence, l’Organisation internationale de la francophonie enfourche un nouveau cheval de bataille : l’action politique au niveau international, axée sur la prévention des conflits impliquant certains de ses membres.
En quelques années, l’OIF devient une sorte de para ONU françafricaine pour la grande satisfaction des hommes politiques français, bien éloignée de la question linguistique commune.
Ainsi, sous un prétexte en soi louable, c’est la question de la francophonie qui se trouve obérée. Pour beaucoup de pays qui adhèrent à l’Organisation internationale de la francophonie, celle-ci peut apparaître comme un outil diplomatique propre à la France, où les autres n’ont guère leur place.
La francophonie est limitée par le complexe de Fachoda.
Elle est cantonnée au rôle d’un instrument destiné à bloquer l’adversaire, à le fixer sur ses positions, à lui interdire l’accès du Pré carré. Etant entendu que l’adversaire est forcément anglo-saxon. Le combat pour la francophonie est tout entier marqué par cette attitude.
Ces évolutions indiquent qu’il n’est pas certain que la France et la francophonie disposent d’une grande stratégie culturelle en faveur du français.
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