vendredi 13 janvier 2012

Génocide au Rwanda: le juge Trévidic sous des menaces.

Komla KPOGLI
13 janvier 2012

Il y a 48 heures nous écrivions sur le rapport de l'expertise balistique commandée par le juge Marc Trévidic à propos de l'attentat contre Juvénal Habyarimana du Rwanda. Ce rapport conclut très clairement que l'avion de Habyarimana avait été bombardé depuis le camp militaire tenu par la garde présidentielle. Un camp tenu par les Hutus extrémistes qui, par cet acte, mettaient fin aux négociations politiques  entre le pouvoir qu'ils entendaient garder exclusivement et les combattants du FPR (Front patriotique Rwandais) menés par Paul Kagamé.  ( Voir http://lajuda.blogspot.com/2012/01/genocide-au-rwanda-enfin-la-verite.html).

Marc Trévidic
Rappelons que les juges Marc Trévidic et Poux ont succédé au fameux juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière qui s'est contenté de rédiger des rapports depuis son balcon parisien une pipe au bec pour imputer l'attentat contre Habyarimana aux combattants du FPR. Cette construction a eu pour conséquence l'élaboration des thèses négationnistes qui véhiculaient l'idée que le génocide n'avait pas été planifié et qu'il est né de la réaction des hutus qui avaient cherché ainsi à répondre à l'attentat commis par des combattants tutsi. C'est cette version totalement fictive que vient de déconstruire le travail de Marc Trévidic et Poux qui ont remplacé Bruguière qui, il faut le rappeler, a échoué comme candidat de l'UMP (parti de Nicolas Sarkozy) aux législatives de 2007. 

Les experts autoproclamés et autres fameux journalistes d'investigation qui avaient relayé à cor et à cri cette version hollywoodienne de l'attentat auraient eu l'humilité et l'honnêteté de reconnaître leurs erreurs sinon leurs mensonges. Hélas! Ils persistent. Et parmi ceux-ci, on note Charles Onana qui, dans une émission hier, sur France 24 tentait de décrédibiliser les conclusions scientifiques de cette expertise balistique qui s'est déployée sur le terrain au Rwanda durant une semaine avec des géomètres, des acousticiens et des cartographes. Pour Onana, cette expertise doit être contestée car elle n'avait pas interrogé certaines personnes. Curieuse appréciation! Passons.

Nous craignions que ce juge soit l'objet d'injures et de pressions de toute sorte. Et bien, nous n'avions pas tort. Ce matin, on apprend par les soins du Figaro et du Monde que le juge Marc Trévidic qui, à côté du dossier rwandais s'occupe aussi de l'affaire de Karachi, est l'objet de pressions et diverses menaces. Le juge Trévidic a fini par écrire à l'Union syndicale des magistrats (USM), principal syndicat de magistrats de France mentionnant des "mesures […] qui semblent être autant de tentatives de pression, voire de déstabilisation, difficilement acceptables". D'où viennent ces pressions? Du pouvoir. Plus précisément de sa hiérarchie qui lui retire tout doucement quelques dossiers sous le prétexte qu'il est trop chargé. Au printemps dernier, Trévidic a été empêché (par qui?) de se rendre au Niger pour une formation des juges antiterroristes alors que toutes les formalités avaient été remplies. Le Monde écrit: "le juge a été menacé d'un avertissement parce qu'un photographe de presse venu le rencontrer avait pris une photo là où il n'en avait pas le droit. "On a réussi àéviter que cet avertissement soit versé à son dossier […], mais c'était clairement une mesure pré-disciplinaire très désagréable", a estimé le président de l'USM. Cette "accumulation de tracasseries" rappelle à Christophe Régnard le début des ennuis qu'a eus à Nanterre la juge Isabelle Prévost-Desprez avec sa hiérarchie :"Les mises en cause ont commencé comme ça […] et après, on a sorti des choses beaucoup plus graves." "On a voulu faire comprendre à la hiérarchie judiciaire que cela suffisait. Ce genre de tracasseries, pour un magistrat qui instruit des dossiers très sensibles, ce n'est pas acceptable, cela le met dans un état d'esprit très difficile", a ajouté le président de l'USM."

Comme on le voit, on ne sera pas étonné d'apprendre que le juge Trévidic est dessaisi des affaires qu'il instruit.  Car Dans un livre paru en février dernier (Au cœur de l'antiterrorisme, éditions Jean-Claude Lattès), le juge Trévidic disait avoir le sentiment qu'il n'avait plus la confiance de sa hiérarchie parce qu'il avait "commis le péché capital dans la magistrature, le péché de la médiatisation".

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Que sont devenus Sylvanus Olympio, Patrice Lumumba, ou Thomas Sankara ? Tous assassinés pour avoir voulu l’autonomie et la liberté de leur pays, plutôt que de le livrer à des prédateurs, en échange d’un peu d’or ! Souvenez-vous de ces soldats, enrôlés dans l’armée française, pour défendre la « Mère Patrie » pendant la seconde guerre mondiale, et qui furent massacrés, pour avoir demandé que leurs pensions de guerre soient alignées sur celles de leurs frères d’armes français. Que sont devenus ceux de Setif qui après la victoire sur l’Allemagne nazie, réclamaient eux aussi plus de liberté !
Voir:
http://2ccr.unblog.fr/2010/12/05/afrique-terre-de-pillages/